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Page 84
�Luba le rencontra le lendemain dans la for�t, o� elle remplissait
de framboises un panier qu'elle avait tress� elle-m�me. L'ours la
poursuivit, mais avec gentillesse, comme un galant jeune homme poursuit
une jolie femme. Probablement le dr�le �tait attir� par l'odeur des
framboises. Luba le laisse venir tout pr�s, l'appelle et lui donne sur
le museau un coup de corbeille qui le met en fuite.
�L'id�e me vient de verser une bonne lamp�e d'eau-de-vie de geni�vre
dans un plat rempli de miel que je place devant notre porte. L'ours
repara�t le soir, s'approche du feu, l�ve le nez, d�couvre le plat et se
met � le l�cher. Lorsqu'il eut fini il se dressa, joyeux, sur son train
de derri�re; en m�me temps il chancelait d'une mani�re suspecte; il
�tait ivre sans doute. J'�clatai de rire, Luba aussi, et alors l'ours,
qui d�j� s'�loignait, se retourna brusquement. Nous l'avions offens�.
Avec un grognement irrit�, il essaya de traverser le pont qui conduisait
� notre g�te, mais il roula dans le foss�; d�j� notre porte �tait
barricad�e; nous nous moquions de lui.
�L'automne fit m�rir les pommes sauvages et chassa les hirondelles;
l'hiver revint. Cette fois il n'offrait rien de triste, car nous avions
notre enfant vigoureux, gai, babillant comme une jeune alouette.
L'univers tout entier aurait pu s'�crouler et dispara�tre; peu nous
importait, pourvu que le rocher sur lequel nous avions fond� notre vie
de famille rest�t debout. Paul n'avait pas un an quand Luba le posa
dans un coin, s'accroupit devant lui et l'appela par de douces paroles
jusqu'� ce qu'il os�t essayer un pas, puis deux, et enfin s'avancer vers
moi en chancelant, semblable � un ourson, dans son habit de fourrure, et
tout aussi espi�gle.
�Et le printemps revint � son tour, l'heure b�nie o� tout ce qui respire
est encore � l'�tat de joyeuse enfance.
�Les feuilles ne s'�taient pas encore teint�es de rouge et de jaune, que
Paul courait d�j� comme une belette et faisait de chaque branche une
balan�oire.
�Un jour d'octobre, des bergers qui descendaient avec leurs troupeaux
vers la polonina s'�tant �gar�s dans le brouillard, pass�rent tout pr�s
de nos rochers. Mon coeur se serra d'angoisse, mais je n'en laissai rien
para�tre. J'allai hardiment leur tendre la main et leur demander du
tabac. Ma longue barbe, mon habillement �trange, le fusil et la hache
que je portais les trompant, ils me prirent pour un haydamak[13]. Chacun
d'eux me donna ce qu'il avait avec joie, car le haydamak �tait � cette
�poque le h�ros favori de notre peuple. Voyant monter la fum�e de notre
chemin�e, ils voulurent savoir si je demeurais l� depuis longtemps.
[Note 13: Brigand.]
�--Depuis deux ann�es, r�pondis-je.
�--Tout seul?
�Je les emmenai voir ma femme et mon enfant; je leur donnai de
l'eau-de-vie et des peaux de b�tes. Ils partirent avec force
b�n�dictions et je les remis dans leur chemin.
VII
�Une ann�e encore s'�coula. Le grand plaisir de Paul �tait de m'entendre
raconter des histoires. Je lui parlais de la multitude d'hommes de toute
sorte qui remplit le monde, et de guerres, et d'inondations, et de
Tartares, et de Turcs, et des l�gendes de chez nous; je lui parlais
aussi de Dieu. Quand nous nous promenions ensemble et que le soleil,
sortant des grands nuages blancs, inondait tout de ses rayons, Paul me
demandait:
�--Qu'est-ce qu'il y a donc l�-haut?
�Et je lui r�pondais:
�--Il y a le bon Dieu.
�Quand l'orage d�chirait les t�n�bres et que Paul me r�p�tait:
�--Qu'est-ce qu'il y a?
�Je r�pondais toujours:
�--C'est le bon Dieu.
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