Le legs de Caïn by Leopold Ritter von Sacher-Masoch


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Page 67

�--Dr�le? vous trouvez cela parce que vous me ha�ssez!

�--Moi, je vous hais?

�--Riez donc! vous avez toute raison de rire, en effet, puisque vous
savez que je vous aime comme un fou.

�--Eh bien! je vous aime de m�me, r�plique Luba, riant de plus belle.

�Et je reprends en col�re:

�--C'est cela, tournez-moi en ridicule! Tenez, je suis capable de vous
tuer.

�--Et moi je suis capable de t'embrasser! dit-elle en sautant � mon cou.

�Je veux me d�gager, je balbutie:

�--Luba, tu es m�chante de plaisanter ainsi avec un malheureux qui
t'aime, qui t'aime... Ah! tu ne te doutes pas...

�--Si fait, je m'en doute, interrompt Luba, mais cela ne m'emp�che pas
de rire de ta col�re. Moi aussi je t'aime depuis... depuis toujours, je
crois,--je ne saurais dire dans quel temps je ne t'ai pas aim�...

�Elle riait encore, le visage cach� dans ma poitrine:

�--Mais embrasse-moi donc! Ne comprends-tu pas que je t'appartiens?

�--Luba... Tu veux...

�Mes l�vres sont sur les siennes. Ce fut un doux moment. Son souvenir
rend cette cruelle journ�e plus p�nible encore � supporter.

�Les Juifs sont toujours l�!...

�--Regarde donc! dit ma femme.

�Et elle rit � se tordre. Un de mes cr�anciers est parmi les acheteurs;
il a empoign� un �tui de velours rouge et l'ouvre avidement; ses
longs doigts osseux croient d�j� saisir les diamants... le voici
p�trifi�.--Brave homme, les diamants sont depuis longtemps en gage, et
nous avons laiss� passer l'�ch�ance.

�L'�tui est vide. Je l'avais donn� � Luba lors de nos fian�ailles.
Nous ne devions nous marier qu'un an apr�s. Aussi nos fian�ailles
furent-elles solennelles; c'est une coutume du vieux temps. J'arrivai le
soir avec mes t�moins. La famille, r�unie dans le salon, m'attendait.
Luba parut la derni�re; elle avait quelque peine � garder son s�rieux,
mais elle se contraignit et fit bonne contenance. Nous �change�mes nos
anneaux, apr�s quoi je lui baisai la main. Le pr�tre nous donna sa
b�n�diction. Nous nous prostern�mes aux pieds des parents, � qui je
jurai de rendre leur fille heureuse, et � leur tour ils nous b�nirent.
Puis le p�re but � notre sant�; le gobelet de famille, rempli de vin de
Hongrie, passa de main en main. Enfin, je pr�sentai � Luba les diamants
dans leur �tui, et elle me mit au doigt une bague. Celle-ci est all�e de
son c�t�, h�las! aux Juifs maudits!

�Le mariage de ma soeur co�ncida avec nos fian�ailles; elle �tait si
press�e! Notre bonheur paraissait l'inqui�ter; elle voulait s'�loigner
avant qu'une ma�tresse entr�t dans la maison. Vi�ra prit donc le premier
mari qui se pr�senta, un petit employ� du gouvernement de notre cercle,
et elle emporta tout ce qu'elle put. Tant mieux! Autant de moins pour
les Juifs!

�Quelles belles noces on nous fit! Tout le monde fut invit�. Il vint
tant de convives, que nous d�mes faire construire en planches une
grande salle � c�t� de la seigneurie de mon beau-p�re. De grand matin
arriv�rent tra�neaux sur tra�neaux; le vestibule fut encombr� de
fourrures. Luba portait une robe de soie blanche, une couronne de myrte,
un voile de dentelle; sa m�re lui attacha au c�t� un petit bouquet de
romarin dans lequel �tait cach� un peu de pain et de sel, moyen s�r,
selon la croyance populaire, de ne jamais manquer du n�cessaire. De
nouveau, nous nous agenouill�mes devant les parents. Pendant que le
cort�ge se rendait � l'�glise, des coups de feu retentissaient de toutes
parts. Luba �clata de rire en me jurant ob�issance. La table formait
un grand L, l'initiale de la mari�e; au milieu, une pyramide en sucre,
haute de quatre pieds, repr�sentait le temple de l'hymen. Qui aurait
pu compter les toasts port�s aux nouveaux �poux, � la ma�tresse de la
maison, au ma�tre, aux dames en g�n�ral, � la patrie? Et chaque fois
les bouteilles �taient cass�es avec fracas. Au dessert, les jeunes gens
disparurent sous la table, non pas vaincus par l'ivresse, mais dans
le dessein chevaleresque de boire dans le soulier de la mari�e. Luba
s'aper�ut trop tard de leurs pr�tentions et replia vite ses jambes sous
elle, mais elle ne r�ussit � sauver ainsi que ses jarreti�res, qui
autrement lui eussent �t� enlev�es, de m�me que le petit soulier blanc
que conquit mon ami Urbanovitch. Pendant qu'il le remplissait de
Champagne pour le vider ensuite � la sant� de Luba, tout le monde
applaudissait. Luba �tait fort rouge. Le soulier fit le tour de la
table; chacun des hommes but dedans, et chacun aussi porta un toast �
Luba, parfois en vers, le vieux g�n�ral Krasiki en beau latin.

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Books | Photos | Paul Mutton | Wed 24th Dec 2025, 23:56