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Page 6
--Je le trouverai plus ais�ment au th��tre qu'ailleurs, r�pondit Warwara
d'un ton sec.
Les roues de la _butka_ �branlaient d�j� le pav�; la longue voiture de
forme orientale, couverte d'une toile et charg�e de juifs pauvres des
deux sexes, s'arr�ta devant la porte.
--Adieu! dit la fille.
--Adieu! r�pondit la m�re.
Elles se s�par�rent ainsi.
Warwara, montant lentement dans le chariot, d'o� s'exhalait une forte
odeur d'ail, prit place entre une marchande de volaille et un boucher.
Les chevaux partirent au trot. Apr�s une course de quelques heures �
travers la plaine d�sol�e qu'entrecoupaient � de rares intervalles
quelques collines basses, un village ou un bouquet de saules, ils
s'arr�t�rent devant une auberge juive o�, de temps imm�morial, les
voyageurs pour Lemberg avaient pass� la nuit. Warwara n'obtint pas de
g�te sans quelque peine; encore �tait-ce une mauvaise petite chambre
humide au rez-de-chauss�e; l'unique fen�tre qui ouvrait sur la cour
�tait rapi�c�e par des morceaux de papier de toutes couleurs; sur le
lit, il n'y avait qu'une m�chante paillasse et un matelas; mais enfin
c'�tait une chambre. Les appartements habitables se trouvaient �tre
retenus par des personnages de plus haute importance, dont les gens
devaient loger dans les cal�ches qui encombraient la cour. Toute la
soci�t� juive, parfum�e d'ail, s'installa aussi pour la nuit sous la
tente de la _butka_.
Warwara s'assit devant une des tables de la salle � manger; elle avait
faim. On ne put lui offrir que des oeufs, dont elle se contenta en y
trempant des mouillettes de pain bis. Non loin d'elle, un jeune homme,
le front appuy� sur ses deux mains, semblait dormir. Le bruit que fit
un couteau en tombant l'�veilla; il leva deux grands yeux bleus sur la
jeune fille et sembla stup�fait, presque effray�. Peut-�tre cette blonde
image sortie trop brusquement du brouillard de ses r�ves se m�lait-elle
encore � l'un d'eux. Avec un trouble charmant, il rougit, mit la main
devant ses yeux et �ta son bonnet pour saluer l'�blouissante apparition.
Warwara r�pondit avec une n�gligence coquette, comme toute Polonaise
de race r�pond au salut d'un homme. Pendant quelques minutes, ces deux
�tres jeunes et beaux ne firent que se regarder, trouvant sans doute
� cette mutuelle contemplation un extr�me plaisir. Chaque fois que
l'�tranger tournait les yeux vers Warwara, elle baissait les siens,
de m�me qu'il ne manquait pas de siffler tout bas en �tudiant avec
attention les peintures de la chambre chaque fois que le regard per�ant
de la voyageuse se posait sur lui. Il pouvait se laisser regarder sans
crainte aussi bien qu'elle-m�me: grand, svelte, un peu fr�le peut-�tre,
il avait cette �l�gante aisance de d�marche et de mani�res que nul ne
peut apprendre et qui pla�t tant aux femmes. Les traits n'�taient pas
absolument r�guliers, mais d�licats, spirituels et toujours �clair�s
par un sourire vainqueur. L'entretien muet de leurs yeux fut interrompu
enfin par Warwara, qui demandait � l'aubergiste une carafe d'eau.
Aussit�t l'�tranger se leva et, s'approchant avec un balancement des
hanches coquet, presque f�minin, pria la dame de lui faire la gr�ce
de ne pas boire cette eau, sortie d'une mare croupissante o� l'on ne
pouvait puiser que la fi�vre; en m�me temps, il s'offrait � pr�parer du
th�, ce que la jeune fille accepta gracieusement. Aussit�t il courut
chercher de l'eau, la mit sur le feu et, tandis qu'elle bouillait,
sortit d'une gibeci�re des viandes froides et des confitures auxquelles
Warwara fit honneur.
--Maintenant, dit le galant inconnu, pardonnez-moi une question qui
risquerait de vous para�tre inconvenante si je n'�tais pas un homme
grave, un homme mari�... Vous �tes-vous pourvue de linge de lit?
--Je n'y ai pas pens�.
--Permettez-moi donc d'am�liorer votre g�te de mon mieux, sans que vous
ayez � vous en occuper.
Warwara resta la bouche entr'ouverte de surprise, ce qui, du reste, lui
allait tr�s-bien. Un malaise vague et ind�finissable s'�tait empar�
d'elle.
--Vous �tes mari�? Votre femme est-elle belle?
--On le dit, r�pliqua n�gligemment le jeune homme.
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