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Page 25
--Voil�, dit-il, la sup�riorit� que donne une poche vide; on attend les
bandits en chantant.
--Je crois vraiment que tu les appelles! balbutia Warwara qui se mit �
prier.
Elle avait peur de ce qui lui semblait �tre chez Maryan un acc�s
de d�mence autant que des bandits eux-m�mes. De plus en plus elle
regrettait ses vingt mille florins. Au lieu de se r�tablir, Maryan
languissait, �puis� par un combat atroce, celui de la passion invincible
et du m�pris de lui-m�me.
Hermine le devinait. Elle parlait peu, restait � son �gard dans une
demi-r�serve, mais elle �tait toujours l� quand il souffrait, une tasse
de tisane ou une drogue � la main.
--Ma petite boh�mienne! disait Maryan.
Et elle se trouvait r�compens�e.
Parfois Warwara la chassait avec col�re; la jalousie s'emparait d'elle:
--Si j'�tait soup�onneuse!... disait-elle.
--Que soup�onnerais-tu? demandait Maryan.
--Que tu me pr�f�res cette ch�tive laideron au teint noir. Je ne serais
pas la premi�re femme tromp�e.
Maryan d�tournait la t�te d'un air de lassitude. Qu'elle le comprenait
peu! Comme s'il e�t pu bannir un seul instant de sa pens�e, de son
coeur, dont elle torturait toutes les fibres, la cruelle idole �
laquelle il s'�tait donn�! Souvent, apr�s des sc�nes de passion
insens�e, il l'�loignait de lui.
--Que tu es belle et affreuse � la fois! lui disait-il. Je ne te
souhaite pas de devenir vieille! Quand les ann�es auront eu raison de
la volupt� de ton corps, tout le monde te fuira. Tu mourras seule et
abhorr�e.
--Grand Dieu! ne me parle pas de mourir! s'�cria-t-elle en cachant son
visage dans ses mains devenues tout � coup froides et tremblantes.
--Non, parlons de la vie, de ta vie, car la mienne sera courte. Pourquoi
essayerais-je de te conseiller, de t'exhorter? Rien ne nous change au
moral, nous restons tels que nous avons �t� cr��s... D'ailleurs, je ne
te verrai pas vieillir. Que m'importe donc ton avenir? Aujourd'hui tu
m'appartiens, tu es jeune, tu es belle, je serais fou de ne pas trouver
divin ton sein blanc parce qu'il loge un caillou au lieu d'un coeur.
Le langage de Maryan �tait souvent amer, ses bizarreries �taient souvent
sinistres; si Warwara se montrait aussi patiente, c'est que jamais il
n'avait �t� plus beau, le mal implacable qui le minait donnait � son
visage amaigri un charme id�al qui, pour tout autre oeil que le sien,
e�t sembl� de mauvais augure. En effet, un vomissement de sang plus
terrible encore que le premier, mit le pauvre Maryan, vers la fin
de l'hiver, aux portes du tombeau. Hermine redevint sa garde-malade
assidue, silencieuse. Cette fois Warwara ne s'enfuit pas, elle remporta
sur ses nerfs une victoire m�morable et alla le voir r�guli�rement
chaque jour; mais sa visite ne durait gu�re que dix minutes, dix minutes
dont le malade �tait reconnaissant et qui lui donnaient la force
d'attendre le lendemain. Cependant, comme la crise se prolongeait et
qu'apr�s trois semaines, Maryan pouvait � peine quitter son lit pour
aller, soutenu sous les deux bras, respirer au soleil sur la terrasse,
Warwara finit par se lasser. Elle s'en remit � Hermine du soin de
soigner et de distraire Maryan, et prit, quant � elle, son parti de se
promener seule, d'aller seule au th��tre.
Ces fa�ons ind�pendantes ne choquent personne dans la soci�t� russe et
polonaise. Elle rencontra une �l�gante de Moscou, madame Iraleff, jeune
veuve �mancip�e qui devint vite son amie intime. On n'aurait pu parler
d'harmonie entre deux personnes de cette sorte. Madame Iraleff �tait
comme madame Bromirska un instrument humain accord� � faux; mais enfin
elles se comprirent. La jeune veuve avait un fr�re, v�ritable Adonis
de style moderne, major dans l'arm�e russe, qui, � la suite d'un duel,
avait obtenu un cong� illimit� dont il profitait pour dresser des
chevaux et des chiens avec l'art d'un entra�neur de profession. Le comte
Mirosoff ne quitta plus les deux dames et l'ennui de Warwara se dissipa
soudain comme un mauvais r�ve.
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