Le legs de Caïn by Leopold Ritter von Sacher-Masoch


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Page 13

--Le mariage, la vie de ce pauvre gar�on �taient en jeu, ajoutait
Bromirski; je n'ai pu r�sister au plaisir de le sauver.

Warwara fut ou feignit d'�tre dupe, mais elle ne tarda pas � d�couvrir
que son mari avait fait quelques petites dettes. Elle les paya, puis
manda le baron dans sa chambre, dont elle ferma la porte. Bromirski
tremblait comme un meurtrier qu'on am�ne devant la preuve sanglante de
son forfait.

--N'as-tu pas honte d'emprunter, dit Warwara, riche comme tu l'es?...

--Moi!... c'est un malentendu... Ne vas pas te f�cher...

Elle se posa devant le mis�rable, en le mena�ant du doigt:

--Que cela ne t'arrive pas une seconde fois! pronon�a-t-elle lentement,
d'une voix si s�v�re, avec un tel regard, que Bromirski recula jusqu'�
ce qu'il fut coll� au mur, en balbutiant:

--Tu me fais peur.

Warwara poss�dait une seconde clef du bureau de son mari; aussit�t qu'il
s'absentait, elle visitait tous les tiroirs afin de s'assurer qu'il
n'avait pas fait de nouveau testament. De jour en jour, elle prenait
plus d'ascendant sur lui; elle finit par lui interdire d'aller jouer
chez les voisins.

--Qu'ils se r�unissent plut�t ici une fois par semaine, dit-elle; au
moins, de cette fa�on, tu ne risqueras rien, car nous aurons soin de ne
jamais jouer ensemble: quand tu perdras, je gagnerai; quand je perdrai,
tu gagneras. Comprends-tu?

L'h�te ordinaire des Bromirski �tait, outre le cur�, un certain Albin de
Lindenthal, fils d'un ancien gouverneur du cercle et Polonais enrag�,
comme le sont en Gallicie tous les fils d'employ�s allemands. Ce
Lindenthal, beau cavalier d'une trentaine d'ann�es, faisait � la baronne
une cour respectueuse, mais d�cid�e. Il lui apportait des violettes et
des roses en plein hiver, il lui donnait les plus belles s�r�nades.
Le jour de sa f�te, il imagina une f�te champ�tre. Les gar�ons et les
filles de quatre villages r�unis vinrent chanter et danser la
kolomika autour d'un feu o� r�tissait, attach� � un jeune bouleau qui
repr�sentait la broche, un boeuf tout entier, tandis qu'un jet d'eau
improvis� faisait jaillir des flots d'eau-de-vie. Lindenthal invita la
baronne pour une mazurke, et du haut du perron Bromirski regardait,
ravi, en fumant sa pipe turque.

A quelque temps de l�, Warwara, toujours attentive aupr�s de son vieux
mari, lui persuada que les longues veilles ne convenaient pas � sa
sant�. La partie de whist ne dura plus jusqu'� minuit, le cur� vint
moins souvent; en revanche, Lindenthal �tait chaque soir assidu � la
seigneurie, et quand le baron allait se reposer, il restait volontiers
aupr�s de sa femme, lui tenant compagnie.

Malgr� tous les soins dont il �tait l'objet, Bromirski tomba malade
cet hiver-l�, et au printemps il mourut. Warwara le n�gligea beaucoup
pendant sa maladie, car elle avait peur du spectacle m�me de la
souffrance; il la fit demander � la fin, mais la femme de chambre vint
annoncer avec toute l'emphase polonaise que madame la baronne �tait
tomb�e sans connaissance, de sorte que Bromirski expira sans lui avoir
dit adieu, en murmurant sans cesse ces mots: �Pauvre femme! pauvre
femme!�

A peine son fid�le valet de chambre lui eut-il ferm� les yeux que
Warwara le fit porter hors de la maison dans la salle mortuaire; puis,
apr�s que les fen�tres eurent �t� ouvertes une heure de suite et la
chambre d�ment parfum�e, elle fit l'effort d'entrer pour fouiller tous
les tiroirs. S'�tant assur�e qu'ils ne renfermaient rien de contraire �
ses int�r�ts, elle mit le testament, qu'elle avait toujours gard�, dans
le bureau du d�funt.

Bromirski fut transport� avec pompe jusqu'au caveau de la famille.
Sa veuve n'assista pas � la c�r�monie; le d�sespoir l'en emp�cha.
Lindenthal marchait v�tu de noir derri�re le cercueil, suivi de la foule
des serviteurs.

Un homme de loi parut � Separowze pour l'ouverture du testament.

Warwara entrait en possession d'une fortune consid�rable. Elle n'avait
que vingt-deux ans.

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Books | Photos | Paul Mutton | Thu 18th Dec 2025, 17:54