Colomba by Prosper Mérimée


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Page 30

Il se rapprochait du village, dont il s'�tait fort �loign� sans
s'en apercevoir, lorsqu'il entendit la voix d'une petite fille qui
chantait, se croyant seule sans doute, dans un sentier au bord du
maquis. C'�tait cet air lent et monotone consacr� aux lamentations
fun�bres, et l'enfant chantait: �� mon fils, mon fils en lointain
pays -- gardez ma croix et ma chemise sanglante...�

�Que chantes-tu l�, petite? dit Orso d'un ton de col�re, en
paraissant tout � coup.

-- C'est vous, Ors' Anton'! s'�cria l'enfant un peu effray�e...
C'est une chanson de mademoiselle Colomba...

-- Je te d�fends de la chanter�, dit Orso d'une voix terrible.

L'enfant, tournant la t�te � droite et � gauche, semblait chercher
de quel c�t� elle pourrait se sauver, et sans doute elle se serait
enfuie si elle n'e�t �t� retenue par le soin de conserver un gros
paquet qu'on voyait sur l'herbe � ses pieds.

Orso eut honte de sa violence. �Que portes-tu l�, ma petite?� lui
demanda-t-il le plus doucement qu'il put. Et comme Chilina
h�sitait � r�pondre, il souleva le linge qui enveloppait le
paquet, et vit qu'il contenait un pain et d'autres provisions. ��
qui portes-tu ce pain, ma mignonne? lui demanda-t-il.

-- Vous le savez bien, monsieur; � mon oncle.

-- Et ton oncle n'est-il pas bandit?

-- Pour vous servir, monsieur Ors' Anton'.

-- Si les gendarmes te rencontraient, ils te demanderaient o� tu
vas...

-- Je leur dirais, r�pondit l'enfant sans h�siter, que je porte �
manger aux Lucquois qui coupent le maquis.

-- Et si tu trouvais quelque chasseur affam� qui voul�t d�ner �
tes d�pens et te prendre tes provisions?...

-- On n'oserait. Je dirais que c'est pour mon oncle.

-- En effet, il n'est point homme � se laisser prendre son
d�ner... Il t'aime bien, ton oncle?

-- Oh! oui, Ors' Anton'. Depuis que mon papa est mort, il a soin
de la famille: de ma m�re, de moi et de ma petite soeur. Avant que
maman f�t malade, il la recommandait aux riches pour qu'on lui
donn�t de l'ouvrage. Le maire me donne une robe tous les ans, et
le cur� me montre le cat�chisme et � lire depuis que mon oncle
leur a parl�. Mais c'est votre soeur surtout qui est bonne pour
nous.�

En ce moment, un chien parut dans le sentier. La petite fille,
portant deux doigts � sa bouche, fit entendre un sifflement aigu:
aussit�t le chien vint � elle et la caressa, puis s'enfon�a
brusquement dans le maquis. Bient�t deux hommes mal v�tus, mais
bien arm�s, se lev�rent derri�re une c�p�e � quelques pas d'Orso.
On e�t dit qu'ils s'�taient avanc�s en rampant comme des
couleuvres au milieu du fourr� de cistes et de myrtes qui couvrait
le terrain.

�Oh! Ors' Anton', soyez le bienvenu, dit le plus �g� de ces deux
hommes. Eh quoi! vous ne me reconnaissez pas?

-- Non, dit Orso le regardant fixement.

-- C'est dr�le comme une barbe et un bonnet pointu vous changent
un homme! Allons, mon lieutenant, regardez bien. Avez-vous donc
oubli� les anciens de Waterloo? Vous ne vous souvenez plus de
Brando Savelli, qui a d�chir� plus d'une cartouche � c�t� de vous
dans ce jour de malheur?

-- Quoi! c'est toi! dit Orso. Et tu as d�sert� en 1816!

-- Comme vous dites, mon lieutenant. Dame, le service ennuie, et
puis j'avais un compte � r�gler dans ce pays-ci. Ha! ha! Chili, tu
es une brave fille. Sers-nous vite car nous avons faim. Vous
n'avez pas d'id�e, mon lieutenant, comme on a d'app�tit dans le
maquis. Qu'est-ce qui nous envoie cela, mademoiselle Colomba ou le
maire?

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Books | Photos | Paul Mutton | Tue 23rd Dec 2025, 2:00