Les conteurs à la ronde by Charles Dickens


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Page 23

Le vieux lord qui jouait de l'orgue �tait le p�re le miss
Furnivall, ou plut�t de miss Grace, comme l'appelait Doroth�e, car
miss Maude, �tant l'a�n�e, portait de droit le titre de miss
Furnivall. Le vieux lord �tait d�vor� d'orgueil. Jamais on ne vit,
jamais on n'entendit parler d'un homme aussi fier, et ses filles
�taient comme lui. Personne ne leur semblait assez bon pour
devenir leur mari. Cependant le choix ne leur manquait pas, car
c'�taient les plus grandes beaut�s de leurs temps, comme j'avais
pu le voir par leurs portraits dans le salon de c�r�monie. Mais,
dit le vieux proverbe, �l'orgueil aura sa chute.� Ces deux beaut�s
hautaines devinrent amoureuses du m�me homme, et ce n'�tait qu'un
musicien �tranger, amen� de Londres par leur p�re pour faire de la
musique avec lui dans son manoir. Par dessus toutes choses,
l'orgueil de famille except�, le vieux lord aimait la musique; il
en �tait fou et savait jouer de presque tous les instruments; mais
cela n'avait adouci en rien son caract�re farouche. Le fier et dur
vieillard avait fait, dit-on, mourir sa femme de chagrin. Il
appela donc pr�s de lui un �tranger qui faisait de la musique si
harmonieuse que les oiseaux m�mes sur les arbres suspendaient
leurs chants pour l'�couter. Par degr�s, le nouveau venu s'empara
si bien de l'esprit du vieux lord que celui-ci le rappelait chaque
ann�e � Furnivall. Ce fut lui qui fit venir l'orgue de Hollande et
qui l'installa dans la grande salle o� il �tait encore de mon
temps. Il apprit au vieux seigneur � en jouer; mais bien des fois,
lorsque lord Furnivall ne pensait qu'� son bel orgue et aux
accords qu'il en tirait, l'�tranger au teint brun et aux cheveux
noirs se promenait dans les bois avec l'une des jeunes dames;
tant�t avec miss Maude, tant�t avec miss Gr�ce.

Miss Maude, pour son malheur, finit par emporter le prix. Ils se
mari�rent secr�tement, et avant la prochaine visite annuelle de
l'�tranger, elle donna le jour � une petite fille dans une ferme
au milieu des bruy�res, tandis que son p�re et miss Gr�ce la
croyaient aux courses de Doncastre. Maintenant �pouse et m�re, son
caract�re ne s'adoucit pas le moins du monde; elle resta tout
aussi hautaine, tout aussi passionn�e que jamais, et peut-�tre
davantage, car elle �tait jalouse de miss Gr�ce � qui le musicien
�tranger faisait une cour assidue, pour d�tourner les soup�ons,
disait-il. Mais miss Gr�ce, triomphant avec affectation de sa
victoire apparente sur miss Maude, celle-ci s'exasp�rait de plus
en plus contre son mari et contre sa soeur. Il �tait facile au
premier de secouer un joug qui lui devenait d�sagr�able, et de
chercher dans les pays �trangers un refuge contre la jalousie des
deux soeurs. Il partit cet �t�-l� un mois avant l'�poque
habituelle de son d�part en donnant � entendre qu'il pourrait bien
ne pas revenir. Dans l'intervalle, la petite fille fut laiss�e �
la ferme, et sa m�re avait l'habitude de faire seller son cheval
et de galoper au loin sur les collines, en apparence sans aucun
but, mais en r�alit� pour voir son enfant une fois au moins par
semaine, car lorsqu'elle aimait, elle aimait bien, comme elle ne
savait pas ha�r � demi. Le vieux lord continuait de jouer de son
orgue; et les serviteurs pensaient que la musique avait fini par
adoucir son redoutable caract�re, dont toujours, au dire de
Doroth�e, on racontait de bien terribles histoires. Il devint
infirme et fut oblig� de se servir d'une b�quille pour marcher.
Son fils a�n�, le p�re du lord Furnivall actuel, �tait alors avec
l'arm�e en Am�rique, et l'autre fils en mer, en sorte que miss
Maude faisait � peu pr�s � sa mode, et, de jour en jour, il y
avait plus de froideur et d'amertume entre elle et miss Grace.
Elles finirent par se parler � peine, si ce n'est en pr�sence du
vieux lord. Le musicien �tranger revint encore l'�t� suivant, mais
ce fut la derni�re fois; car, avec leurs jalousies et leurs
col�res, les deux soeurs lui faisaient mener une telle vie qu'il
s'en lassa. Il partit donc, et on n'en entendit plus parler. Miss
Maude, qui avait toujours eu l'intention de faire conna�tre son
mariage quand son p�re serait mort, se voyait maintenant
abandonn�e avec un enfant qu'elle n'osait avouer, mais dont elle
�tait folle, redoutant son p�re, ha�ssant sa soeur et forc�e de
vivre avec eux. L'�t� suivant se passe donc sans qu'on v�t
repara�tre l'�tranger. Miss Maude et miss Grace, devenues tristes
et sombres toutes les deux, �taient aussi belles que jamais, mais
il y avait quelque chose d'�gar� dans leur regard. Peu � peu
cependant le front de miss Maude s'�claircit. Son p�re, dont les
infirmit�s augmentaient toujours, se laissait de plus en plus
absorber par sa musique. Miss Grace et sa soeur vivaient presque �
part, occupant des appartements s�par�s, miss Grace dans l'aile
occidentale, miss Maude dans l'aile orientale, les chambres m�mes
qu'on avait depuis condamn�es. Cette derni�re crut donc pouvoir
prendre sa fille avec elle, sans que personne en s�t rien, except�
ceux qui n'oseraient en parler et seraient tenus de croire, sur sa
parole, que c'�tait l'enfant d'une villageoise, pour lequel elle
avait pris un caprice. Tout cela, disait Doroth�e, �tait assez
bien connu; mais personne ne savait ce qui �tait arriv� ensuite,
si ce n'est miss Grace et mistress Stark qui, attach�e d�s ce
temps-l� � sa personne, comme femme de chambre, �tait beaucoup
plus son amie que sa propre soeur. Mais, d'apr�s certains mots
�chapp�s �� et l�, les domestiques supposaient que miss Maude
s'�tait vant�e � miss Grace de son triomphe et l'avait ais�ment
convaincue que le musicien �tranger s'�tait jou� d'elle avec son
amour pr�tendu, puisqu'il en avait �pous� une autre en secret. �
dater de ce jour, les joues et les l�vres de miss Grace perdirent
leur �clat; on l'entendit souvent r�p�ter qu'elle se vengerait t�t
ou tard. Mistress Stark, de son c�t�, ne cessait d'�pier ce qui se
passait dans les appartements de l'aile orientale.

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Books | Photos | Paul Mutton | Tue 11th Nov 2025, 17:52