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Page 18
Un jour, je m'en souviens, ma mignonne for�a Doroth�e � venir avec
nous pour nous expliquer les portraits. C'�taient tous des
portraits de membres de la famille, mais Doroth�e ne savait pas
bien les noms. Apr�s avoir visit� la plupart des chambres, nous
arriv�mes dans le vieux salon de r�ception, au-dessus de la grande
salle. Il y avait l� un portrait de miss Furnivall; ou comme on
l'appelait dans ce temps-l�, miss Grace, car elle �tait la soeur
cadette. �a avait d� �tre une beaut�! Mais quel regard fixe et
fier! Quel d�dain dans ses beaux yeux! Leurs sourcils m�mes
semblaient se relever, comme si elle s'�tonnait qu'on e�t
l'impertinence de la regarder; et sa l�vre se plissait. Elle avait
un costume dont je n'avais jamais vu le pareil; mais c'�tait la
mode dans ce temps-l�, disait Doroth�e. Son chapeau, d'une esp�ce
de castor blanc, �tait un peu relev� au-dessus du front et orn�
d'une magnifique plume qui en faisait le tour; sa robe, de satin
blanc, laissait voir un corsage blanc richement brod�.
�Assur�ment! me dis-je apr�s avoir bien regard� ce portrait, la
cr�ature de Dieu se fane comme l'herbe, ainsi qu'il est �crit;
mais qui croirait jamais, � voir miss Furnivall, qu'elle a pu �tre
une beaut� si remarquable?
�Oui, dit Doroth�e. Les gens changent bien tristement; mais, si ce
que Ie p�re de mon ma�tre a l'habitude de dire est vrai, miss
Furnivall, la soeur a�n�e, �tait plus belle encore que miss Grace.
Son portrait est ici quelque part; mais, si je vous le montre, il
ne faut jamais dire, m�me � James, que vous l'avez vu. Croyez-vous
que la petite fille puisse garder le secret?� ajouta-t-elle.
Je n'en �tais pas certaine, car jamais il n'y eut d'enfant si
vive, si hardie, si franche! J'aimais mieux lui dire de se cacher,
lui promettant de chercher apr�s elle. Alors j'aidai Doroth�e �
retourner un grand tableau appuy� contre le mur, au lieu d'�tre
suspendu comme les autres. Ce portrait l'emportait encore en
beaut� sur miss Grace, comme pour l'air altier et d�daigneux;
mais, sous ce dernier rapport, il �tait difficile de choisir. Je
l'aurais regard� pendant une heure, si Doroth�e, tout effray�e de
me l'avoir montr�, ne se f�t h�t�e de le remettre en place, en me
conseillant d'aller tout de suite � la recherche de miss
Rosemonde, �car il y avait, disait-elle, dans la maison de
vilaines places o� elle ne voudrait pas voir l'enfant aller.�
J'�tais une fille courageuse: je m'inqui�tai peu de ce que disait
la vieille femme, car j'aimais � jouer � cache-cache comme pas un
enfant dans la paroisse. Je courus cependant chercher ma, petite.
L'hiver approchait; les jours devenaient de plus en plus courts.
Il me semblait parfois entendre un bruit singulier, comme si
quelqu'un jouait de l'orgue dans la grande salle. J'�tais presque
certaine de ne pas �tre tromp�e par mon oreille. Je n'entendais
pas ce bruit tous les soirs; mais tr�s souvent, et d'ordinaire,
quand, assis pr�s de miss Rosemonde, apr�s l'avoir mise au lit, je
restais tranquille et silencieuse dans la chambre � coucher, c'est
alors que j'entendais les sons de l'orgue r�sonner dans la
distance. Le premier soir, quand je descendis pour souper, je
demandai � Doroth�e qui avait fait de la musique, et James dit
d'un ton tr�s bref que j'�tais bien simple de prendre pour de la
musique les murmures du vent dans les arbres. Doroth�e regarda son
mari d'un air effar�, et Bessy, la fille de cuisine, apr�s avoir
marmonn� quelque chose, s'en alla toute p�le. Voyant bien que ma
question ne leur plaisait pas, je pris le parti de me taire, en
attendant d'�tre seule avec Doroth�e, dont je pourrais tirer bien
des choses. Le lendemain, j'�piai donc le moment favorable, et,
apr�s l'avoir amadou�e, je lui demandai qui jouait de l'orgue;
car, si je m'�tais tue devant James, je savais tr�s bien que je
n'avais pris le bruit du vent pour de la musique. Mais James avait
fait la le�on � Doroth�e, dont je ne pus arracher un mot.
J'essayai alors de Bessy, que j'avais toujours tenue un peu �
distance, car j'�tais sur un pied d'�galit� avec James et
Doroth�e, dont elle n'�tait gu�re que la servante. Elle me fit
bien promettre de n'en jamais rien dire � personne, et si jamais
je le disais, de ne jamais dire que c'�tait elle qui me l'avait
dit; mais c'�tait un bruit bien �trange, et bien des fois elle
l'avait entendu, surtout dans les nuits d'hiver et avant les
temp�tes. On disait dans le pays que c'�tait le vieux lord qui
jouait sur l'orgue de la grande salle, comme il aimait � jouer de
son vivant; mais qui �tait le vieux lord? ou pourquoi jouait-il,
et de pr�f�rence dans les soir�es d'hiver � l'approche des
temp�tes? c'est ce qu'elle ne pouvait ou ne voulait pas me dire.
Je vous ai dit que j'�tais une fille courageuse; eh bien! je
m'amusai assez d'entendre cette grande musique r�sonner dans le
manoir quel que f�t celui qui jouait. Tant�t elle s'�levait au-
dessus des bouff�es de vent, g�missait ou semblait triompher comme
une cr�ature vivante; tant�t elle redevenait d'une compl�te
douceur; mais c'�tait toujours de la musique et des accords... il
�tait ridicule d'appeler cela le vent. Je pensai d'abord que miss
Furnivall, jouait peut-�tre � l'insu de Bessy; mais un jour que
j'�tais seule dans la grande salle, j'ouvris et je l'examinai bien
de tous c�t�s, comme on m'avait fait voir celui de l'�glise de
Grosthwaite, et je vis qu'il �tait tout bris� et d�truit �
l'int�rieur, malgr� sa belle apparence. Alors, quoiqu'on f�t en
plein midi, ma chair commen�a � se crisper; je me h�tai de fermer
l'orgue et je regagnai lestement ma chambre d'enfant, o� il
faisait toujours si clair. � partir de ce temps, je n'aimai pas
plus la musique que James et Doroth�e ne l'aimaient. Dans
l'intervalle, miss Rosemonde se faisait aimer de plus en plus. Les
vieilles dames se faisaient une f�te de l'avoir � table � leur
premier d�ner. James se tenait derri�re la chaise de miss
Furnivall, et moi derri�re miss Rosemonde, en grande c�r�monie.
Apr�s le repas, elle jouait dans un coin du grand salon, sans
faire plus de bruit qu'une souris, tandis que miss Furnivall
dormait et que je d�nais � la cuisine. Cependant elle revenait
volontiers � moi dans la chambre d'enfant: car miss Furnivall
�tait si triste, disait-elle, et mistress Stark si ennuyeuse! Nous
�tions, au contraire, assez gaies toutes les deux. Peu � peu je ne
m'inqui�tai plus de cette musique �trange; si on ne savait pas
d'o� elle venait, du moins elle ne faisait de mal � personne.
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