Le conte futur by Paul Adam


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Page 7

Pour obtenir ce premier avantage que les d�p�ches grossiraient
habilement, les mar�chaux se h�taient de r�unir des hommes sur ce point
de fronti�re. On les arrachait des mines et des sillons. Les fanfares
sonnaient. Les drapeaux claquaient. Les actrices en robe blanche,
drap�es dans les couleurs nationales, chantaient en plein vent, sur des
tr�teaux construits � la h�te, l'_Amour sacr� de la Patrie_. Et les
hommes rouges du sol ferrugineux d�filaient par masses �normes,
remplissant de leurs corps l'espace trop �troit des rues. Les
administrateurs des Compagnies ordonn�rent qu'on d�fon��t des tonneaux
de piquette pour �chauffer l'enthousiasme. Il s'agissait d'enlever ce
pr�cieux avantage, de faire prime sur le march�....

Les gendarmes pressaient les hordes mis�rables, une houle de t�tes
rouges battant les tr�teaux o� les actrices en robes blanches, drap�es
des couleurs nationales, et les cheveux �pars par-dessus le march�, vous
chantaient sans lassitude: _Le jour de gloire_....

Encore quelques heures de train, quelques cahots de wagons, et le
troupeau, garni de brandebourgs, de galons, de ferblanterie, coiff� de
kolbacks, mont� sur des chevaux de r�quisition, est pr�t � conqu�rir
l'avantage (quarante dont un, � la Bourse de demain).

Les caissons roulent sur le caillou des routes. Les escadrons galopent
dans les cris clairs du m�tal. Les r�giments tassent le sol sous les six
mille souliers d'ordonnance. Les officiers caracolent parmi l'�clat de
leur maroquinerie neuve; et voici, sur la cime des collines, o� se
d�roulent des nuages bas, les courts �clairs des pi�ces ennemies.

Parmi les lignes, il y a des gaillards qui culbutent soudain, en des
grimaces de clowns, ou tombent � genoux, ainsi que des illumin�s
fanatiques, tout ahuris de voir au-del�. D'autres encore s'�talent
comme pour dormir, en s'�tirant. Et, quand les colonnes ont pass�,
quand les lignes se sont �tendues, il reste, dans la poussi�re lev�e, de
bonnes t�tes rouges qui toussent leur souffle sur des flaques plus
rouges....

La campagne demeure verte et claire aux replis du fleuve vif. Les bl�s
couvrent la plaine de leur herbe tendre; et c'est l�, dans le creux de
la grande vall�e, un bon nid d'abondance, aux maisonnettes blanches, aux
eaux lumineuses, avec le rebord propice des collines � douces pentes.

A la t�te de soixante cavaliers, Philippe commande un poste
d'observation. Il voit les routes se noircir de grouillements humains,
l'herbe se fleurir des taches �clatantes que donnent les uniformes, les
attelages galoper effr�n�ment par les chemins qui sonnent. Ici et l�,
d'un coup, la flamme se drape au fa�te des m�tairies. Les lignes
d'infanterie s'�largissent � travers les plaines. Elles avancent,
courent, se couchent, cr�pitent et p�tillent, se rel�vent, courent
encore, gagnent les abris, les quittent, laissant, � chaque reposoir,
des corps crisp�s dans la verdure.... Autour de lui, il est tant de
bruits de fusillade, que l'espace semble frire.

Et tout pr�s, les grosses t�tes rouge�tres de ses hommes bleuissent,
sous les gourmettes polies des kolbacks, sous l'apparat violent des
pompons. Les bottes tremblent dans les �triers qui cliquettent. Les
mains �paissies par les labeurs des forges, �pongent la sueur des
fronts. Il se fait dans les groupes de tristes trafics. Les c�libataires
prennent le premier rang pour m�nager la vie plus utile des p�res.
�Va... recule, tu as des enfants.... Je n'en ai point... si je cr�ve; tu
recueilleras ma vieille m�re...�--�Entendu... avance!�

L'adjudant veut r�tablir les rangs et il gronde avec d'affreux
jurons....

--Laissez, dit Philippe... laissez-les se pr�parer � la mort comme il
leur convient, afin qu'ils ne nous ex�crent pas, nous, les bourreaux!...

Un murmure d'�tonnement fait frissonner les �paules des Guides, et ils
regardent le jeune cornette, dont la face douloureuse s'illumine....

Il pense � ce d�sespoir humain; il souffre. La compassion de son �pouse
le navre, parce qu'elle ne peut lui offrir une autre sorte d'amour. Ah!
conqu�rir son admiration par un grand sacrifice, par la beaut� de la
mort sans gloire....

Un cavalier accourt vers sa troupe.... Le capitaine ordonne que le
cornette entra�ne ses hommes au galop de charge, en se dissimulant dans
le chemin creux.... S�rement, il atteindra, de la sorte, cette batterie
ennemie qui trotte sans d�fiance pour prendre position.... Le r�giment
va s'�lancer pour le soutenir....

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Books | Photos | Paul Mutton | Mon 28th Apr 2025, 12:43