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Page 6
Or, cela �tait fort grave, parce qu'on redoutait comme prochain
l'immense conflit des nations du Nord, attendu et pr�par� patiemment
depuis plus de trente ann�es. Des signes certains de bataille
commen�aient � para�tre dans le ciel et dans les propos des diplomates.
On atteignait aux premiers jours du printemps; et le printemps
paraissait, de l'avis de tous les hommes de guerre, le moment le
meilleur pour susciter le massacre mutuel des peuples. On redoublait
d'activit� dans les arsenaux et sur les polygones. Le colonel craignait
que le mauvais esprit de sa troupe ne lui f�t imput� par les mar�chaux
inspecteurs, et, pour d�tourner du raisonnement les intelligences de ses
soldats, il les entra�nait sans r�pit dans des marches et des manoeuvres
propres � lasser leurs forces morales sous la fatigue physique, et � les
rendre dociles � sa main.
Eux, cependant, � courir par les villages et les corons des mineurs,
prenaient une peine plus grande. Ils se lamentaient, disant: �En quelle
�poque barbare, nous vivons encore pour que tant de pauvret� demeure au
monde. Nos m�res nous enfantent dans le seul but d'un dur labeur, et
nous trimons plus que les b�tes, sans avoir, comme les b�tes, le loisir
de ne pas penser. Ah! maudite soit l'heure de br�ve joie o� nos tristes
p�res jet�rent leur semence aux flancs de leurs �pouses d�charn�es. De
quel droit nous cr��rent-ils puisqu'ils ne pouvaient nous l�guer que le
d�sir � jamais inassouvi?
�Et les savants disent que les g�n�rations se succ�dent dans une voie de
progr�s, et que l'homme marche � la conqu�te de Dieu.... Les
pouvons-nous croire, puisque nous apprenons seulement l'art de nous
�gorger, alors que toutes nos forces employ�es � la seule fin
d'am�liorer notre sort, ne r�ussiraient que bien petitement. En v�rit�,
elle a raison la jeune proph�tesse qui crie par les nuits que nous
demeurons barbares comme les loups, et que jamais nous ne tiendrons le
bonheur, parce que nous aimons trop le sang.... Voil� maintenant qu'on a
pr�par� les tambours et les drapeaux.... Il va falloir se ruer sur les
pauvres diables des autres nations, sans que nous puissions m�me
comprendre le motif de notre rage.... Nos pieds ont d�j� �t� durcis sur
les routes, et nos �paules ne sentent plus le poids du havresac...
Voyons, ne se l�vera-t-il pas un homme fort, parmi nous, qui
proclamerait enfin la r�volution de l'Amour universel?�
Et les petits soldats se poussaient l'un l'autre et ils disaient: �Toi,
toi...� mais nul n'osait prendre la parole.
Enfin, le d�lire de Francine s'att�nua. Elle r�cup�ra de la sant� et de
la raison. Mais quand M. de Chaclos voulut reparler des noces, Philom�ne
lui affirma qu'elle resterait fille. Et il comprit bien qu'elle
partageait alors le sentiment de sa soeur, et qu'il lui faisait horreur
� cause du sang dont il s'�tait couvert.
Un peu plus tard, il connut que Philom�ne s'�tait fianc�e � Philippe....
Cela ne le surprit point, parce qu'il avait entendu presque de leurs
conversations, les soirs de primev�res.
Le cornette changea de garnison et vint au fort avec un d�tachement de
Guides.
Depuis lors, M. de Chaclos v�cut tristement; car il ch�rissait Philom�ne
selon la t�nacit� des derni�res passions. La presque certitude qu'il
avait eue de l'�pouser avait rendu plus in�branlable cet amour de la
quaranti�me ann�e. N�anmoins, son �me �tait noble, il persuada au
colonel de marier Philom�ne et Philippe. Et comme la jeune fille
remarquait avec �tonnement son entremise, il lui r�pondit qu'il
l'aimait pour elle, non pour lui; et pr�f�rait la savoir heureuse aux
bras d'un autre, plut�t que malheureuse aux siens. Cela lui vaudrait
infiniment moins de douleur.
Quand on sortit de l'�glise, le cornette dit � sa femme: �Voici que vous
vous sacrifiez � moi par compassion. Je t�cherai maintenant de m�riter
votre admiration.�
La guerre survint....
Le Fort gardait la fronti�re. On tira de ses coupoles le premier coup de
canon.
Les troupes de la ville arriv�rent, et puis ce furent les troupeaux
d'ouvriers et de paysans qui descendirent des trains. On les rev�tit
d'uniformes, on leur distribua des armes. Au dehors, les grandes routes
se remplirent d'enfants et de m�res qui mendiaient. Les jeunes filles se
prostituaient presque pour rien. Sur l'horizon, les donjons des usines
cess�rent de flamboyer pour la premi�re fois depuis trente ans. Le
boulevard de la ville �tait plein d'activit� parce qu'on avait jou� � la
baisse des fonds publics, dans les palais des Compagnies d'assurances,
Soci�t�s m�tallurgiques et banques de cr�dit. Les hommes d'argent
rachetaient d�j� en sous main les titres de rente afin de les revendre,
avec prime, d�s l'annonce du premier avantage.
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