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Page 2
L�-bas, � Bodemberg Schloss[1] o� s'�tait �coul�e son adolescence,
Henry repr�senta longtemps un blondin gracile, l�g�rement menac�
d'an�mie et de consomption, la physionomie r�fl�chie et
concentr�e, au large front bomb�, aux joues d'un rose mourant, un
feu pr�coce ardant dans ses grands yeux d'un bleu sombre tirant
sur le violet de l'am�thyste et la pourpre des nu�es et des vagues
au couchant; la t�te trop forte �crasant sous son faix les �paules
tombantes; les membres ch�tifs, la poitrine sans consistance. La
constitution d�bile du petit Dykgrave le d�signait m�me aux
brimades de ses condisciples, mais il y avait �chapp� par le
prestige de son intelligence, prestige qui s'imposait jusqu'aux
professeurs. Tous respectaient son besoin de solitude, de r�verie,
sa propension � fuir les communs d�lassements, � se promener seul
dans les profondeurs du parc, n'ayant pour compagnon qu'un auteur
favori ou m�me, le plus souvent, se contentant de sa seule pens�e.
Son �tat maladif augmentait encore sa susceptibilit�. Souvent des
migraines, des fi�vres intermittentes le clouaient au lit et
l'isolaient durant plusieurs jours. Une fois, comme il venait
d'atteindre sa quinzi�me ann�e, il pensa se noyer pendant une
promenade sur l'eau, un de ses camarades ayant fait chavirer la
barque. Il fut plusieurs semaines entre la vie et la mort, puis,
par un �trange caprice de l'organisme humain, il se trouva que
l'accident qui avait failli l'enlever d�termina la crise
salutaire, la r�action si longtemps souhait�e par son a�eule dont
il �tait tout l'amour et le dernier espoir. Avec les tuteurs du
jeune comte, elle avait m�me fait choix de ce pensionnat si
�loign�, parce que celui-ci repr�sentait, en m�me temps qu'un
coll�ge mod�le, un v�ritable _Kurhaus_ situ� dans la partie la
plus salubre de la Suisse. Avant d'�tre converti en un gymnase
cosmopolite destin� aux jeunes patriciens des deux mondes, le
Bodemberg Schloss avait �t� un �tablissement de bains, rendez-vous
des malades �l�gants de la Suisse et de l'Allemagne du Sud.
L'a�eule d'Henry avait donc compt� sur le climat salubre de la
vall�e de l'Aar et l'hygi�ne de cette maison d'�ducation, pour
rattacher � la vie, pour r�g�n�rer l'unique descendant d'une race
illustre. Ce petit-fils idol�tr�, n'�tait-il pas le seul enfant de
ses enfants morts de trop d'amour?
Kehlmark recouvra non seulement la sant�, mais il se trouva
gratifi� d'une constitution nouvelle; non seulement une rapide
convalescence lui rendit ses forces anciennes, mais il se surprit
� grandir, � se carrer, � gagner des muscles, des pectoraux, de la
chair et du sang. Avec ce regain d'adolescence, il �tait venu �
Kehlmark une candeur, une ing�nuit� dont son �me, trop studieuse
et trop r�fl�chie jusque-l�, ignorait la ti�deur et le baume.
Autrefois contempteur des travaux athl�tiques, � pr�sent il se mit
� s'y entra�ner et finit par y exceller. Loin de bouder comme
nagu�re aux p�rip�ties des gageures violentes, il se distinguait
par son intr�pidit�, son acharnement; et lui qui, pour s'�pargner
la fatigue d'une ascension dans le Jura, se cachait souvent dans
les souterrains, au fond des anciennes �tuves de la maison de
bains, brillait maintenant parmi les plus infatigables escaladeurs
de montagnes.
Il demeura, en m�me temps que liseur et homme d'�tude, grand
amateur de prouesses physiques et de jeux d�coratifs; rappelant
sous ce rapport les hommes accomplis, les harmonieux vivants de la
Renaissance.
� la mort de la douairi�re qu'il adorait, il �tait venu s'�tablir
dans le pays dont, depuis ses ann�es de coll�ge, il entretenait un
souvenir filial et dont les habitants impulsifs et primesautiers
devaient plaire � son �me friande d'exub�rance et de franchise.
Les aborig�nes de Smaragdis appartenaient � cette race celtique
qui a fait les Bretons et les Irlandais. Au XVIe si�cle, des
croisements avec les Espagnols y perp�tu�rent, y inv�t�r�rent
encore la pr�dominance du sang brun sur la lymphe blonde. Kehlmark
savait ces insulaires, tranchant par leur complexion nerveuse et
fonc�e sur les populations blanches et ros�tres qui les
entouraient -- faire exception aussi, dans le reste du royaume,
par une sourde r�sistance � la morale chr�tienne et surtout
protestante. Lors de la conversion de ces contr�es, les barbares
de Smaragdis n'accept�rent le bapt�me qu'� la suite d'une guerre
d'extermination que leur firent les chr�tiens pour venger l'ap�tre
saint Olfgar, martyris� avec toutes sortes d'inventions
cannibalesques, repr�sent�es d'ailleurs m�ticuleusement et presque
professionnellement en des fresques d�corant l'�glise paroissiale
de Zoutbertinge, par un �l�ve de Thierry Bouts, le peintre des
�corch�s vifs. La l�gende voulait que les femmes de Smaragdis se
fussent particuli�rement distingu�es dans cette tuerie, au point
m�me d'ajouter le stupre � la f�rocit� et d'en agir avec Olfgar
comme les bacchantes avec Orph�e.
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