Escal-Vigor by Georges Eekhoud


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Page 1

Smaragdis ou l'�le smaragdine d�pend du royaume mi-germain et mi-
celtique de Kerlingalande. � l'origine du commerce occidental, une
colonie de marchands hans�ates s'y fixa. Les Kehlmark pr�tendaient
descendre des rois de mer ou vikings danois. Banquiers un peu
m�tin�s de pirates, hommes d'action et de savoir, ils suivirent
Fr�d�ric Barberousse dans ses exp�ditions en Italie, et se
distingu�rent par un attachement in�branlable, la fid�lit� du
thane pour son roi, � la maison de Hohenstaufen.

Un Kehlmark avait m�me �t� le favori de Fr�d�ric II, le sultan de
Lucera, cet empereur voluptueux, le plus artiste de cette
romanesque maison de Souabe, qui v�cut les r�ves profonds et
virils du Nord dans la radieuse patrie du soleil. Ce Kehlmark
p�rit � B�n�vent avec Manfred, le fils de son ami.

Aujourd'hui encore, un grand panneau de la salle de billard
d'Escal-Vigor repr�sentait Conradin, le dernier des Hohenstaufen,
embrassant Fr�d�ric de Bade avant de monter avec lui sur
l'�chafaud.

Au XVe si�cle, � Anvers, un Kehlmark florissait, cr�ancier des
rois, comme les Fugger et les Salviati, et il figurait parmi ces
Hans�ates fastueux qui se rendaient � la cath�drale ou � la
Bourse, pr�c�d�s de joueurs de fifres et de violes.

Demeure historique et m�me l�gendaire, tenant d'un burg teuton et
d'un palazzo italien, le ch�teau d'Escal-Vigor se dresse �
l'extr�mit� occidentale de l'�le, � l'intersection de deux tr�s
hautes digues d'ou il domine tout le pays.

De temps imm�morial, les Kehlmark, avaient �t� consid�r�s comme
les ma�tres et les protecteurs de Smaragdis. La garde et
l'entretien des digues monumentales leur incombaient depuis des
si�cles. On attribuait m�me � un anc�tre d'Henry la construction
de ces remparts �normes qui avaient � jamais pr�serv� la contr�e
de ces inondations, voire de ces submersions totales dans
lesquelles s'engloutirent plusieurs �les soeurs.

Une seule fois, vers l'an 1400, en une nuit de cataclysme, la mer
�tait parvenue � rompre une partie de cette cha�ne de collines
artificielles et � rouler ses flots furieux jusqu'au coeur de
l'�le m�me; et la tradition voulait que le burg d'Escal-Vigor e�t
�t� assez vaste et assez approvisionn� pour servir de refuge et
d'entrep�t � toute la population.

Tant que les eaux couvrirent le pays, le Dykgrave h�bergea son
peuple, et lorsqu'elles se furent retir�es, non seulement il
r�para la digue � ses frais, mais il reb�tit les chaumi�res de ses
vassaux. Avec le temps, ces digues, pr�s de cinq fois s�culaires,
avaient rev�tu l'aspect de collines naturelles. Elles �taient
plant�es, � leur cr�te, d'�pais rideaux d'arbres un peu pench�s
par le vent d'ouest. Le point culminant �tait celui o� les deux
rang�es de collines se rejoignaient pour former une sorte de
plateau ou de promontoire, avan�ant comme un �peron ou une proue
dans la mer. C'�tait pr�cis�ment � l'extr�mit� de ce cap que se
dressait le ch�teau. Face � l'Oc�an, la digue taill�e � pic
pr�sentait un mur de granit rappelant ces rocs majestueux du Rhin
dans lesquels semble avoir �t� d�coup� le manoir qui les couronne.

� mar�e haute, les vagues venaient se briser au pied de cette
forteresse �rig�e contre leurs fureurs. Du c�t� des terres, les
deux digues d�valaient en pente douce, et, � mesure qu'elles
s'�cartaient, leurs branches formaient un vallon allant en
s'�largissant et qui repr�sentait un parc merveilleux avec des
futaies, des �tangs, des p�turages. Les arbres, jamais �mond�s,
ouvraient de larges �ventails toujours fr�missants d'arp�ges
�oliens. Les fuites de daims passaient comme un �clair fauve parmi
les frondaisons compactes, o� des vaches broutaient cette herbe
humide et succulente d'un vert presque fluide qui avait valu �
l'�le son nom de Smaragdis ou d'�meraude.

Malgr� la popularit� des Kehlmark dans le pays, ces derniers vingt
ans le domaine �tait demeur� inhabit�. Les parents du comte
actuel, deux �tres jeunes et beaux, s'y �taient aim�s au point de
ne pouvoir survivre l'un � l'autre. Henry y �tait n� quelques mois
avant leur mort. Sa grand'm�re paternelle le recueillit, mais ne
voulut plus remettre le pied dans cette contr�e, � l'atmosph�re et
au climat capiteux de laquelle elle attribuait la fin pr�matur�e
de ses enfants. Kehlmark fut �lev� sur le continent, dans la
capitale du royaume de Kerlingalande, puis, sur les conseils des
m�decins, on l'avait envoy� �tudier dans un pensionnat
international de la Suisse.

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Books | Photos | Paul Mutton | Thu 25th Apr 2024, 4:31