Escal-Vigor by Georges Eekhoud


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Page 17

-- Mis�rable hypocrite! Tu mens!

La furie appliqua de nouveaux soufflets � la fillette en la
sommant chaque fois de parler, puis, comme Blandine continuait �
se rebiffer, elle se mit � la battre des poings et des pieds.

Pour se donner du coeur, sous les coups, Blandine, un sourire aux
l�vres, se rappelait le grand gar�on, au teint de bronze nouveau,
aux yeux tristes et implorateurs. Il lui �tait agr�able d'endurer
quelque chose pour cet homme traqu� et honni.

La mar�tre la tra�nait par terre, exasp�r�e par cette s�r�nit�.

Alors, indiff�rente � la douleur, opini�tr�e dans son d�vouement,
Blandine se mit � chanter l'_Ave Maris Stella, _un des cantiques
du mois de mai. Puis, sous les coups qui continuaient � pleuvoir
sur elle, l'enfant se sugg�ra le bruit sec du van sur le genou
d'Ariaan. D�faillante, mais moralement, in�branlable, elle m�lait
les deux chants, le cantique religieux et la villanelle du
manoeuvre; et, fermant les yeux, elle confondit en un souvenir
fanatique les fum�es de l'encens et la poussi�re s'�levant au-
dessus du van, les parfums de l'�glise et la sueur du rustre:

_Van!... Vanne!... Vanvarla!
Balle!... Vole! Vanci! Vanla!
Vanne!... Ave!... Maris!... Stella!_

La voyant tout en sang, la forcen�e la tra�na dans l'auge � porcs,
l'y enferma, et lui fit apporter par l'un des enfants une cruche
d'eau et un quignon de pain. Le lendemain, la mara�ch�re tenta de
revenir � la charge, mais elle e�t succomb� elle-m�me avant de
tirer de Blandine ce qu'elle voulait savoir.

De guerre lasse, la vertueuse paysanne fit entreprendre sa fille
par le cur�.

Celui-ci fut paterne et patelin:

-- Qu'est-ce � dire, petite Blandine, me faut-il croire ce que
raconte votre digne m�re? On fait la m�chante t�te!... On se
r�volte. Apr�s avoir faut� on refuse de dire son complice... Ah,
c'est mal, bien mal cela!

-- Mon p�re, j'ai avou� ma faute � ma m�re et suis pr�te � vous la
confesser, mais la d�lation me r�pugne...

-- Tout beau, ma fille! Comme nous nous exaltons! Et si moi, votre
pasteur, j'estimais qu'il vous faut nous livrer le nom de ce
malfaiteur...

-- Je refuserais tout de m�me, monsieur le cur�.

Et comme le pr�tre, interloqu� par cette insubordination, lui
lan�ait un regard dur, Blandine �clata en sanglots:

-- Oui, je refuserais, monsieur le cur�, ce nom je ne le dirais
m�me pas au bon Dieu si sa providence l'ignorait! Cet homme est
d�j� bien assez malheureux! Le nommer serait lui valoir une
nouvelle condamnation. On le retiendrait plus longtemps en prison
� cause de moi!...

La candide enfant avait �t� bien �difi�e depuis ces derniers jours
sur les lois humaines et les conventions du juste et de l'injuste.

-- Mais, objecta le pr�tre, vous l'aimez donc ce mis�rable!

-- Je ne sais si je l'aime, mais je ne le hais point.

-- Il vous a cependant fait du mal, mon enfant!

-- Peut-�tre... Je veux m�me le croire, puisque vous l'affirmez;
mais, monsieur le cur�, n'est-il pas dit dans le cat�chisme que
nous devons pardonner � nos ennemis, ch�rir jusqu'� ceux qui nous
ha�ssent!...

Le pr�tre maugr�a, mais n'insista point.

La paysanne, curieuse et salace, changeant de tactique voulut au
moins savoir si l'enfant avait �t� prise par violence.

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Books | Photos | Paul Mutton | Mon 15th Dec 2025, 22:40