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Page 7
Dans toutes les boutiques on voyait une cagoule blanche. Chez
l'armurier Costecalde au milieu des fusils, des carabines et des
couteaux de chasse, au comptoir du mercier Beaumevieille derri�re
les rang�es de bobines de soie, partout se dressait la m�me
apparition d'un grand oiseau blanc qui semblait un p�lican
familier. Et la pr�sence des P�res �tait pour chaque demeure une
vraie b�n�diction. Bien �lev�s, doux, enjou�s, discrets, ils
n'�taient pas g�nants, ne tenaient pas une grande place au foyer,
et cependant y apportaient une bont�, une r�serve inaccoutum�e.
C'�tait comme si l'on avait eu le bon Dieu chez soi: les hommes se
retenaient de jurer et de dire des gros mots; les femmes ne
mentaient plus, ou gu�re; les petits restaient bien sages et bien
droits sur leur chaise haute.
Le matin, le soir, � l'heure de la pri�re, aux repas pour le
_B�n�dicit�_ et les _Gr�ces_, les grandes manches blanches
s'ouvraient comme des ailes protectrices sur toute la famille
assembl�e, et, avec cette b�n�diction perp�tuelle au-dessus de
leur t�te, les Tarasconnais ne pouvaient faire autrement que de
vivre saints et vertueux.
Chacun �tait fier de son R�v�rend, le vantait, le faisait valoir,
surtout le pharmacien B�zuquet, � qui la bonne fortune �tait �chue
d'avoir chez lui le P�re Bataillet.
Tout feu, tout nerfs, ce R. P. Bataillet, dou� d'une v�ritable
�loquence populaire, et renomm� pour sa mani�re de raconter
paraboles et l�gendes; c'�tait un superbe gaillard, bien d�coupl�
le teint br�l�, des yeux de braise, une t�te de cab�cilla. Sous
les longs plis de l'�paisse bure, il avait vraiment belle
prestance, bien qu'une �paule f�t un peu plus haute que l'autre,
et qu'il march�t de c�t�.
Mais on ne s'apercevait plus de ces l�gers d�fauts, lorsqu'il
descendait de chaire, apr�s le sermon, et fendait la foule, son
grand nez au vent, press� de regagner la sacristie, tout vibrant
encore, et secou� lui-m�me par sa propre �loquence. Les femmes
enthousiastes, coupaient au passage avec leurs ciseaux des
morceaux de sa cape blanche; on l'appelait � cause de cela le
�P�re festonn�, et sa robe �tait toujours tellement d�chiquet�e,
si t�t hors d'usage, que le couvent avait grand-peine � l'en
fournir.
B�zuquet, �tait donc devant la pharmacie avec Pascalon, et en face
d'eux le P�re Bataillet, assis sur sa chaise � la cavali�re. Ils
respiraient avec d�lices, dans une s�curit� b�ate de repos, car en
ce moment de la journ�e il n'y a, plus de client�le pour B�zuquet.
C'est comme pendant la nuit; les malades peuvent bien se rouler,
se tortiller: le brave pharmacien ne se d�rangerait pour rien au
monde; l'heure est pass�e d'�tre malade.
Il �coutait, ainsi que Pascalon, une de ces belles histoires
comme, savait en conter le R�v�rend, pendant qu'au lointain de la
ville ou attendait passer la retraite au milieu des fredons d'un
beau couchant d'�t�.
Tout � coup l'�l�ve se leva, rouge, �mu, et b�gaya, le doigt tendu
vers l'autre extr�mit� de la Placette:
�Voil� monsieur Tar... tar... tarin!�.
On sait quelle admiration personnelle et particuli�re professait
Pascalon pour le grand homme dont la silhouette gesticulante se
d�tachait l�-bas dans les brumes lumineuses, accompagn�e d'un
autre personnage gant� de gris, soign� de mise, et qui semblait
�couter, silencieux et raide.
Quelqu'un du Nord, cela se voyait de reste.
Dans le Midi, l'homme du Nord se reconna�t � son attitude
tranquille, � la concision de son lent parler, tout aussi s�rement
que le m�ridional se trahit dans le Nord par son exub�rance de
pantomime et de d�bit.
Les Tarasconnais �taient habitu�s � voir souvent Tartarin en
compagnie d'�trangers, car on ne passe pas dans leur ville sans
visiter comme attraction le fameux tueur de lions, l'alpiniste
illustre, le Vauban moderne � qui le si�ge de Pamp�rigouste
faisait une renomm�e nouvelle.
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