Port-Tarascon by Alphonse Daudet


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Page 6

�Oui ou non, sommes-nous les assi�g�s? Est-ce nous qui devons
donner l'assaut?...�

Il y eut autour de lui un murmure approbateur:

��videmment... Il a raison... C'est � eux de commencer, puisqu'ils
assi�gent Et l'on vit une fois de plus que nul ne connaissait les
lois de la guerre comme Tartarin.

Il fallait pourtant prendre un parti.

Un jour, le Conseil se rassembla dans la grande salle du Chapitre,
�clair�e de hauts vitraux, entour�e de boiseries sculpt�es, et le
P�re h�telier lut son rapport sur les ressources de la place. Tous
les P�res-Blancs �coutaient, silencieux, droits sur leurs
_mis�ricordes_, demi-si�ges � forme hypocrite qui permettent
d'�tre assis en paraissant debout.

Lamentable, le rapport du P�re h�telier! Ce qu'ils avaient d�vor�
depuis le commencement du si�ge, les Tarasconnais! P�t�s
d'hirondelles, tant de cents; pains-poires, tant de mille; et tant
de ceci, et tant de cela! De toutes les choses qu'il �num�rait et
dont on �tait au commencement si bien pourvu, il restait si peu,
si peu, qu'autant dire il n'en restait rien.

Les R�v�rends se regardaient l'un l'autre, la mine longue, et
convenaient entre eux qu'avec toutes ces r�serves, �tant donn�
l'attitude d'un ennemi qui ne voulait rien pousser � l'extr�me,
ils auraient pu tenir pendant des ann�es sans manquer de rien, si
l'on n'�tait venu � leur secours. Le P�re h�telier, d'une voix
monotone et navr�e, continuait de lire, quand une clameur
l'interrompit.

La porte de la salle ouverte avec fracas, Tartarin para�t, un
Tartarin �mu, tragique, le sang aux joues, la barbe bouffante sur
la croix blanche de son costume. Il salue de l'�p�e le Prieur tout
droit sur sa mis�ricorde, puis les P�res l'un apr�s l'autre, et,
gravement:

�Monsieur le Prieur, je ne peux plus tenir mes hommes... On meurt
de faim... Toutes les citernes sont vides. Le moment est venu de
rendre la place, ou de nous ensevelir sous ses d�bris.�

Ce qu'il ne disait pas, mais qui avait bien aussi son importance,
c'est que, depuis quinze jours, il �tait priv� de son chocolat du
matin, qu'il le voyait en r�ve, gras, fumant, huileux, accompagn�
d'un verre d'eau fra�che claire comme du cristal, au lieu de l'eau
saum�tre des citernes, � laquelle il �tait r�duit maintenant.

Tout de suite le Conseil fut debout, et dans une rumeur de voix
parlant toutes ensemble exprima un avis unanime:

�Rendre la place... Il faut rendre la place...� Seul, le P�re
Bataillet, un homme excessif, proposa de faire sauter le couvent
avec ce qu'on avait de poudre, d'y mettre le feu lui-m�me.

Mais on refusa de l'�couter, et la nuit venue, laissant les clefs
sur les portes, moines et miliciens, suivis d'Excourbani�s, de
Bravida, de Tartarin avec son gros de messieurs du cercle, tous
les d�fenseurs de Pamp�rigouste sortirent, sans tambours ni
clairons cette fois, et descendirent silencieusement la colline en
une procession fantomatique, sous la clart� de la lune et le
bienveillant regard des sentinelles ennemies.

Cette m�morable d�fense de l'abbaye fit grand honneur � Tartarin;
mais l'occupation du couvent de leurs P�res-Blancs par les troupes
jeta au coeur des Tarasconnais une sombre rancune.


Chapitre II

_La pharmacie de la Placette. -- Apparition d'un homme du Nord. -
- Dieu le veut, monsieur le Duc! -- Un paradis au-del� des mers._


Quelque temps apr�s la fermeture du couvent, le pharmacien
B�zuquet prenait un soir le frais, devant sa porte, avec son �l�ve
Pascalon et le R�v�rend P�re Bataillet.

Il faut dire que les moines dispers�s avaient �t� recueillis par
les familles tarasconnaises. Chacune avait voulu avoir son P�re
Blanc; les gens ais�s, les boutiquiers, ceux de la bourgeoisie, en
poss�daient un en particulier; quant aux familles artisanes, elles
s'associaient, se mettaient � plusieurs pour entretenir un de ces
saints hommes, en participation.

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Books | Photos | Paul Mutton | Mon 10th Mar 2025, 21:14