Port-Tarascon by Alphonse Daudet


Main
- books.jibble.org



My Books
- IRC Hacks

Misc. Articles
- Meaning of Jibble
- M4 Su Doku
- Computer Scrapbooking
- Setting up Java
- Bootable Java
- Cookies in Java
- Dynamic Graphs
- Social Shakespeare

External Links
- Paul Mutton
- Jibble Photo Gallery
- Jibble Forums
- Google Landmarks
- Jibble Shop
- Free Books
- Intershot Ltd

books.jibble.org

Previous Page | Next Page

Page 8

De cette affluence de visiteurs r�sultait une �re de prosp�rit�
autre fois inconnue.

Les h�teliers faisaient fortune; on vendait chez les libraires des
biographies du grand homme; on ne voyait aux vitrines que ses
portraits en �Teur�, en ascensionniste, en costume de crois�, sous
toutes les formes et dans toutes les attitudes de son existence
h�ro�que.

Mais cette fois ce n'�tait pas un visiteur ordinaire, un premier
venu de passage, qui accompagnait Tartarin.

La Placette travers�e, le h�ros, d'un geste emphatique, d�signa
son compagnon:

�Mon cher B�zuquet, mon R�v�rend P�re, je, vous pr�sente monsieur
le duc de Mons...�.

Un duc!... _Outre!_

Il n'en �tait jamais venu � Tarascon. On y avait bien vu un
chameau, un baobab, une peau de lion, une collection de fl�ches
empoisonn�es et d'alpenstocks d'honneur... mais un duc, jamais!

B�zuquet s'�tait lev�, saluait, un peu intimid� de se trouver
ainsi, sans avoir �t� pr�venu, en pr�sence d'un si grand
personnage. Il bredouillait: �Monsieur le Duc...� Tartarin
l'interrompit:

�Entrons, messieurs, nous avons � parler de choses graves.�

Il passa le premier, le dos rond, l'air myst�rieux, dans le petit
salon de la pharmacie, dont la fen�tre, donnant sur la place,
servait de vitrine pour les bocaux � foetus, les longs t�nias en
tricot, et les paquets de cigarettes de camphre.

La porte se referma sur eux comme sur des conspirateurs. Pascalon
restait seul dans la boutique, avec l'ordre de B�zuquet de
r�pondre aux clients et de ne laisser personne approcher du salon
sous aucun pr�texte.

L'�l�ve, tr�s intrigu�, se mit � ranger sur les �tag�res les
bo�tes de jujube, les flacons de _sirupus gummi_ et autres
produits d'officine.

Le bruit des voix, par moments, arrivant jusqu'� lui, il
distinguait surtout le creux de Tartarin prof�rant des mots
�tranges:

�Polyn�sie... Paradis terrestre..., canne � sucre,
distilleries..., colonie libre.� Puis un �clat du P�re Bataillet:
�Bravo! J'en suis�. Quant � l'homme du Nord, il parlait si bas,
qu'on n'entendait rien.

Pascalon avait beau enfoncer son oreille dans la serrure... Tout �
coup, la porte s'ouvrit avec fracas, pouss�e _manu militari_ par
la poigne �nergique du P�re, et l'�l�ve alla rouler � l'autre bout
de la pharmacie. Mais, dans l'agitation g�n�rale, personne n'y fit
attention.

Tartarin, debout sur le seuil, le doigt lev� vers les paquets de
t�tes de pavots qui s�chaient au plafond de la boutique, avec une
mimique d'archange brandissant le glaive, s'�cria:

�Dieu le veut, monsieur le Duc! Notre oeuvre sera grande!�.

Il y eut une confusion de mains tendues qui se cherchaient, se
m�laient, se serraient, poign�es de mains �nergiques comme pour
sceller � tout jamais d'irr�vocables engagements. Tout chaud de
cette derni�re effusion, Tartarin, redress�, grandi, sortit de la
pharmacie avec le duc de Mons pour continuer leur tourn�e en
ville.

Deux jours apr�s, le _Forum_ et le _Galoubet_, les deux organes de
Tarascon, �taient pleins d'articles ci de r�clames sur une
colossale affaire. Le titre portait en grosses lettres:

�COLONIE LIBRE DE PORT-TARASCON.� Et des annonces stup�fiantes:

�� vendre, terres � 5 francs l'hectare donnant un rendement de
plusieurs mille francs par an... Fortune rapide et assur�e... On
demande des colons.� Puis venait l'historique de l'�le o� devait
s'�tablir la colonie projet�e, �le achet�e au roi N�gonko par le
duc de Mons dans le cours de ses voyages, entour�e d'ailleurs
d'autres territoires qu'on pourrait acqu�rir plus tard pour
agrandir les �tablissements.

Previous Page | Next Page


Books | Photos | Paul Mutton | Tue 11th Mar 2025, 3:10