Port-Tarascon by Alphonse Daudet


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Page 39

�� mort... � mort!... zou!...� se firent entendre. Excourbani�s,
pour se donner l'air plus militaire, avait repris le mot de
Scrapouchinat et criait �qu'il fallait les fusiller tous comme des
singes verts!�

Tartarin se tourna vers lui, et du geste arr�tant ce furieux:

�Spiridion, dit-il, respectons les lois de la guerre.�

Ne vous extasiez pas trop cette belle parole masquait un acte
politique.

D�fenseur acharn� du duc de Mons, au fond Tartarin gardait un
doute. Si tout de m�me il avait eu affaire � un filou! Le trait�
que de Mons disait avoir pass� avec le roi N�gonko pour l'achat de
l'�le serait alors faux comme le reste, le territoire ne leur
appartiendrait pas. Les bons pour hectares ne seraient que des
papiers sans valeur.

Aussi le Gouverneur, bien loin de songer � fusiller ses
prisonniers comme des �singes verts�. fit-il au roi papoua une
r�ception solennelle.

Il savait comment s'y prendre, ayant lu tous les r�cits des
navigateurs, connaissant par coeur Cook, Bougainville,
d'Entrecasteaux.

Il s'approcha du roi et frotta son nez contre le sien. Le sauvage
parut tr�s surpris, car cet usage n'existait plus depuis longtemps
chez ces peuplades. Pourtant le roi se laissa faire, croyant sans
doute � quelque tradition tarasconnaise; et les autres
prisonniers, voyant cela, m�me la petite Likiriki qui n'avait
qu'un petit nez de chat, presque pas de nez du tout, voulurent
absolument ex�cuter la m�me c�r�monie avec Tartarin.

Quand on se fut bien frott� le nez, il s'agit d'entrer en
communication par la parole avec ces animaux. Le P�re Bataillet
leur parla d'abord son papoua de par l�-bas, mais comme ce n'�tait
pas le papoua de par ici, naturellement ils n'y comprirent goutte.
Cic�ron Franquebalme, qui savait � peu pr�s l'anglais, essaya de
cette langue. Excourbani�s leur bredouilla quelques mots
d'espagnol, mais sans plus de succ�s l'un que l'autre.

�Faisons-les toujours manger,� dit alors Tartarin.

On ouvrit quelques boites de thon. Cette fois les sauvages
comprirent, se jet�rent aussit�t sur les conserves, et les
d�vor�rent gloutonnement, vidant les boites, les nettoyant
jusqu'au fond avec leurs doigts ruisselants d'huile. Puis, apr�s
de larges lamp�es d'eau-de-vie qu'il semblait aimer tout
particuli�rement, le roi, � la grande stupeur de Tartarin et des
autres, entonna d'une voix rauque:

_D� brin o d� bran_
_Cabussaran_
_Dou fenestroun_
_De Tarascoun_
_Dedins lou Ros�_

Cette chanson tarasconnaise �ruct�e par ce sauvage aux l�vres
lippues, aux dents noires de b�tel, prenait une physionomie
fantastique et f�roce. Mais comment N�gonko savait-il le
tarasconnais?

Apr�s un moment de stup�faction, on s'expliqua.

Pendant les quelques mois de voisinage avec les infortun�s
passagers de la _Farandole _et du _Lucifer, _les Papouas avaient
appris le parler des bords du Rh�ne; ils le d�naturaient bien un
peu mais, les gestes aidant, on pouvait parvenir � s'entendre.

Et l'on s'entendit.

Interrog� au sujet du duc de Mons, le roi N�gonko d�clara que de
ce blanc, ni de qui que ce f�t de semblable jamais de sa vie il
n'avait entendu parler; Pareillement que l'�le n'avait jamais �t�
vendue; Pareillement qu'il n'avait jamais eu de trait�.

Jamais de trait�!... Tartarin, sans s'�mouvoir, en fit pr�parer
un, s�ance tenante.

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Books | Photos | Paul Mutton | Sun 21st Dec 2025, 12:22