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Page 38
Alors, voyons la troisi�me. On la disait tr�s m�chante, celle-l�,
tr�s excit�e. En effet, elle entra dans le cirque au galop,
creusant le sable de ses pieds fourchus, se fouettant les flancs
de sa queue, distribuant les coups de t�te � droite et �
gauche..., Enfin on allait avoir une belle course!... Pas plus! La
b�te prend son �lan, franchit la corde, �carte la foule de ses
cornes baiss�es, et court tout droit se jeter dans la mer.
De l'eau jusqu'au jarret, puis jusqu'au garrot, elle avan�ait,
avan�ait toujours. Bient�t on ne vit plus que ses naseaux, le
croissant de ses deux cornes au-dessus de la mer. Elle resta l�
jusqu'au soir, sinistre, silencieuse et toute la colonie, du
rivage, l'injuriait, la sifflait, lui jetait des pierres, sifflets
et hu�es dont le pauvre �tat de choses, descendu de son estrade,
avait bien aussi sa part.
Les courses manqu�es, il fallait un d�rivatif � la mauvaise humeur
g�n�rale; le meilleur fut la guerre, une exp�dition contre le roi
N�gonko. Le dr�le, depuis la mort de Bravida, de Cambalalette, du
p�re V�zole et de tant d'autres braves Tarasconnais, s'�tait enfui
avec ses Papouas, et d�s lors on n'avait plus entendu parler de
lui. Il habitait, disait-on, dans une �le voisine, � deux ou trois
lieues au large, dont on distinguait les lignes confuses par les
jours clairs, mais invisible la plupart du temps derri�re
l'horizon embrum� de pluies continuelles. Tartarin, d'humeur
pacifique, avait longtemps recul� devant une exp�dition, mais
cette fois la politique le d�cida.
La chaloupe mise en �tat, r�par�e, approvisionn�e, orn�e � l'avant
de la couleuvrine servie par le P�re Bataillet et son sacristain
Galoffre, vingt miliciens bien arm�s embarqu�rent sous les ordres
d'Excourbani�s et du marquis des Espazettes, et un matin on prit
la mer.
Leur absence dura trois jours, qui parurent bien longs � la
colonie. Puis, vers la fin du troisi�me jour, un coup de
couleuvrine entendu au large amena tout le monde sur le rivage, et
l'on vit arriver la chaloupe, ses voiles dehors, l'avant relev�,
d'une allure rapide, comme pouss�e par un vent de triomphe. Avant
m�me qu'elle e�t atteint la plage, les cris joyeux de ceux qui la
montaient, le _�f�n d� brut_� d'Excourbani�s, annon�aient de loin
le succ�s complet de l'exp�dition.
On avait tir� une vengeance �clatante des cannibales, br�l� des
tas de villages, tu� au dire de chacun des milliers de Papouas. Le
chiffre variait, mais toujours �norme; les r�cits aussi
diff�raient; le certain, c'est qu'on ramenait cinq ou six
prisonniers de marque, parmi lesquels le roi N�gonko lui-m�me et
sa fille Likiriki, conduits au Gouvernement au milieu des ovations
que la foule faisait aux vainqueurs.
Les miliciens d�filaient, portant, comme les soldats de Christophe
Colomb au retour de la d�couverte du Nouveau-Monde, toutes sortes
d'objets �tranges, plumes �clatantes, peaux de b�tes, armes et
d�froques de sauvages. Mais on se pressait surtout sur le passage
des prisonniers. Les bons Tarasconnais les examinaient avec une
curiosit� haineuse. Le P�re Bataillet avait fait jeter sur leur
nudit� moricaude quelques couvertures dont ils s'enveloppaient �
demi; et de les voir ainsi affubl�s, de se dire qu'ils avaient
mang� le P�re Vezole, le notaire Cambalalette et tant d'autres, on
sentait le m�me fr�missement de r�pulsion que devant des boas de
m�nagerie dig�rant sous les plis de leur liti�re de laine. Le roi
N�gonko marchait le premier, long vieux noir au gros ventre
d'enfant de lait, coiff� comme d'une calotte par une chevelure
cr�pue et toute blanche, une pipe en terre rouge de Marseille
pendue � son bras gauche par une ficelle. Pr�s de lui la petite
Likiriki, aux yeux luisants de diablotin, par�e de colliers de
corail et de bracelets de coquillages ros�s. Apr�s eux de grands
singes noirs � longs bras, grima�ant d'horribles sourires � dents
pointues.
On se permit d'abord quelques plaisanteries, on disait:
�Voil� de l'ouvrage pour Mlle Tournatoire�, et la bonne vieille
demoiselle, reprise par son id�e fixe, songeait, en effet, �
habiller tous ces sauvages; mais la curiosit� se tourna bient�t en
fureur au souvenir des compatriotes mang�s par les cannibales.
Des clameurs:
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