Contes et historiettes à l'usage des jeunes enfants by Zulma Carraud


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Page 36

Les heures et les demi-heures sonnaient � l'horloge de la ville, et
Marthe les trouvait bien longues � passer. Elle se demandait en pleurant
ce qu'�tait devenue sa bonne. Elle ne comprenait pas qu'une maman
oubli�t ainsi la petite fille qu'elle aimait tant. Elle se mit � genoux
et r�cita toutes ses pri�res, surtout celle � son ange gardien; puis
ayant trouv� un de ses petits livres parmi ses joujoux, elle se mit �
lire; mais les larmes lui troublaient la vue, et elle ne trouvait plus
aucun charme au conte de la _Chatte blanche_, ni � celui de _Peau
d'Ane_, qui l'amusaient tant d'ordinaire. La faim se fit sentir de
nouveau et si fort que, n'y pouvant plus r�sister, Marthe ouvrit encore
l'armoire et prit du chocolat. �Maman, pensa-t-elle, en donnerait bien �
un pauvre qui aurait grand'faim; elle n'en refuserait certainement pas
� sa petite fille.� Ensuite elle mangea quatre biscuits, puis elle eut
soif. Comment faire pour boire? il n'y avait dans l'armoire que des
liqueurs et des sirops. Heureusement elle se rappela que sa m�re
avait fait de l'eau de groseille sans sucre; elle en prit une petite
bouteille; mais elle n'avait pas de tire-bouchon pour l'ouvrir. Alors
elle pria son ange gardien de venir � son secours. Apr�s un moment de
r�flexion, elle cassa le cou de la bouteille et fit jaillir de l'eau de
groseille partout sur sa jolie robe de coutil de laine gris. A l'instant
de boire, elle se rappela que son p�re d�fendait qu'on serv�t ce qui
restait dans les bouteilles qui se cassaient par accident, parce qu'il
craignait qu'il n'y e�t quelques petits morceaux de verre, et qu'il
�tait tr�s-dangereux d'en avaler. Marthe se trouva donc encore bien
embarrass�e; pourtant elle s'avisa d'appliquer son mouchoir sur le
goulot cass� de la bouteille, et elle but tranquillement. Se sentant un
peu soulag�e, elle se remit � lire. Le jour baissa, et l'obscurit� se
fit dans le cabinet. Marthe se remit � genoux et pria encore. Elle eut
peur de se trouver ainsi toute seule: ses pleurs recommenc�rent; puis
elle �couta les bruits de la rue. Si quelqu'un passait aupr�s de la
porte, elle esp�rait que peut-�tre c'�tait la bonne qui rentrait; mais
on allait plus loin, et l'enfant pleurait encore. Quand une voiture
roulait dans le voisinage, elle pensait que c'�tait celle qui ramenait
sa m�re, car elle avait bien entendu qu'on �tait venu la prendre pour
aller � la campagne; mais la voiture s'�loignait, et le coeur de la
petite fille se gonflait encore davantage. Alors Marthe, s'imaginant
qu'elle �tait abandonn�e du monde entier, sanglota bien plus fort;
puis elle se mit � genoux aupr�s de sa petite chaise et pria son ange
gardien:

�O mon bon ange! s'�cria-t-elle en pleurant � chaudes larmes, �tendez
vos belles ailes blanches sur une pauvre petite fille abandonn�e!
regardez-moi toujours! ne me quittez pas des yeux, car j'ai peur! La
nuit vient et je n'ai pas de lumi�re. Mon ange gardien, approchez-vous
bien pr�s: j'ai peur! j'ai peur!�

Elle r�p�ta si souvent sa pri�re qu'elle s'endormit de fatigue, mais en
pleurant toujours.

La bonne rentra: elle pr�para le coucher de sa ma�tresse et celui de
Marthe, puis elle fit ses pri�res en attendant leur retour.

A dix heures, la voiture qui avait emmen� Mme Auclet la ramena. En
quittant son amie, elle la remercia de la bonne journ�e qu'elle lui
avait procur�e; car Mme Auclert avait eu beaucoup de plaisir au ch�teau
d'o� elle revenait.

[Illustration: �O mon bon ange!� s'�cria-t-elle.]

Comme la bonne ne fermait pas la porte apr�s le d�part de la voiture,
Mme Auclert lui demanda ce qu'elle attendait.

�Mais, j'attends Mlle Marthe!

--Comment! Marthe n'est pas couch�e?

--Madame l'a bien emmen�e avec elle?

--Mais non. Quoi! ma fille n'est pas ici? Ma fille! ma fille! cria la
pauvre m�re en s'�lan�ant dans l'escalier, comme si elle e�t perdu la
raison; ma fille, o� es-tu?�

On fouilla toute la maison sans trouver l'enfant. Apr�s avoir cherch�
partout, la bonne se ravisant, dit que Marthe pourrait bien �tre dans le
cabinet aux joujoux.

�C'est impossible, j'en ai �t� la clef moi-m�me.�

On ouvrit cependant ce cabinet, et l'on trouva Marthe � genoux, et la
figure baign�e de larmes. Comme sa robe �tait tach�e d'eau de groseille,
sa m�re, croyant que c'�tait des taches de sang, s'imagina qu'elle �tait
bless�e. Elle se pr�cipita vers elle, la prit dans ses bras et la serra
bien fort contre son coeur.

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Books | Photos | Paul Mutton | Sun 21st Dec 2025, 7:17