En Kabylie by J. Vilbort


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Page 74

Ce jour-l�, les Iraten, ou du moins le plus grand nombre d'entre eux,
demand�rent l'_aman_ [La paix, le pardon.]. Ceux qui ne voulurent point
subir la loi du vainqueur se retir�rent avec nous et les _sofs_
[Patriotes.] alli�s � Ichariten, village des A�th-Aguacha, o� tous
ensemble nous nous m�mes � dresser des barricades et � �lever des
retranchements. Je dois avouer ici que le Cheikh Randon se montra
g�n�reux envers les Iraten vaincus et soumis. Il leur d�clara qu'il ne
voulait ni emmener leurs femmes et leurs enfants, ni prendre leurs
terres, ni br�ler leurs villages, ni couper leurs oliviers et leurs
figuiers. Il les invita � retourner dans leurs maisons, et leur permit
m�me de circuler librement dans son camp, au milieu de ses soldats. Mais
ce n'�tait l� � nos yeux qu'un pi�ge o� ne devaient point se laisser
prendre des patriotes r�solus, comme je l'�tais avec beaucoup d'autres,
� mourir plut�t que de voir l'�tranger s'�tablir en ma�tre dans nos
montagnes. En sorte qu'� Ichariten, nous nous d�cid�mes pour la guerre �
outrance.

Nous nous attendions � �tre attaqu�s d�s le lendemain. Mais ce jour-l�
et les jours suivants, la poudre demeura muette. Nous appr�mes avec
douleur que plusieurs tribus avaient renonc� � la lutte pour suivre la
fortune des Iraten: c'�taient les A�th-Fraoucen, les A�th-bou-Cha�b, les
A�th-Khelili et d'autres encore. Ces d�faillances nous faisaient rougir
pour la nation, mais sans abattre notre courage. Nous le sentions
grandir au contraire, en voyant nos ennemis rester dans leur camp.

Cependant des marabouts vinrent nous annoncer qu'ils recommen�aient le
combat, non pas cette fois contre les hommes, mais contre les rochers;
en effet, nous entendions maintenant des d�tonations plus fortes que des
coups de canon qui ne cessaient d'�clater dans la direction de
Tizi-Ouzou. �Allah! s'�cri�rent les marabouts, frappe ces Roumis de
vertige! Ne se sont-ils pas mis en t�te de renverser nos montagnes? Oui,
c'est � cela qu'ils emploient leur poudre � pr�sent.�

Mais bient�t nous v�mes des murailles sortir de terre sur le
Souk-el-Arba; nous e�mes alors le soup�on que cette poudre-l� n'�tait
point d�pens�e en pure perte. Les Roumis ouvraient une route, et cette
route aboutissait � un fort qui s'�levait, mena�ant, en face du
Djurjura, en plein pays kabyle.

Ce spectacle acheva de nous exasp�rer. Nous nous excitions les uns les
autres en disant: �Ce fort, nous le raserons; et cette route nous m�nera
plus vite jusqu'aux portes d'Alger.� Aussi la lutte fut-elle acharn�e,
lorsqu'un mois [Le 24 juin 1857.], jour pour jour, apr�s la d�faite des
Iraten, vos soldats vinrent attaquer le village d'Ichariten, o� nous
nous �tions retranch�s � la mani�re franque, qu'ils nous avaient
enseign�e en fortifiant leur camp. Mais que peuvent les plus braves
contre la destin�e? Beaucoup des v�tres p�rirent, davantage encore des
n�tres, et le village fut emport�. Je me tirai de cet enfer avec une
l�g�re blessure; une balle m'avait d�chir� les chairs du bras. Plusieurs
de notre contingent rest�rent parmi les morts, et plusieurs autres,
mortellement bless�s, nous demandaient le coup de gr�ce.

Le jour suivant, c'est le territoire des A�th Yenni qui est envahi. On
br�le trois de leurs villages: A�th-el-Hassen, A�th-el-Arba et
Thaourirth Mimoun. Le soir, les Roumis dressent leurs tentes autour des
ruines fumantes. Ils nous ont refoul�s jusqu'� Thaourirth-el-Hadjadj, un
autre village Yenni, �tabli sur la pointe d'un piton et d'o� nous les
voyons, le lendemain, se comporter dans leur camp comme des gens qui
sont chez eux et qui s'y amusent. Ils mangent, boivent, dorment,
chantent et se livrent � toute sorte de jeux. Nous avions, nous, la rage
au coeur. Apr�s s'�tre repos�s et divertis pendant vingt-quatre heures,
ils courent � l'assaut. Nous nous battons en d�sesp�r�s. Le sang
ruisselle dans les rues du village. Mais c'�tait �crit! Avant la nuit,
Thaourirth-el-Hadjadj n'�tait plus qu'un amas de cendres et de ruines.

Trois jours apr�s [Le 30 juin.], c'est le tour d'Agmoun-Izen chez des
A�th-Aguacha. Les habitants veulent rendre le village; mais nous, les
_manefguis_ des _Sofs Cheraga_ [Alli�s de l'Est.], nous nous obstinons
en vain � le vouloir d�fendre. Les tribus atteintes par le flot
envahisseur se r�signent: les Menguelate, les Yenni, les Boudrar, les
Aqbile, les Attaf, les Bou-Youcef, les Akkach, les Ouasif. Toute la
conf�d�ration des _Zouaoua R'raba_ [De l'Ouest.] s'est soumise comme
celle des Iraten. Les conf�d�r�s de l'Est sont seuls ou presque seuls �
se sacrifier maintenant pour la libert� kabyle.

Les traits du beau Kabyle se contractaient, sa parole devenait plus
br�ve � mesure que la guerre, dans son r�cit, se rapprochait de sa tribu
et de son village.

--Bel-Kassem, dit madame Elvire, r�p�te-lui que si ces souvenirs lui
font mal...

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Books | Photos | Paul Mutton | Sat 27th Dec 2025, 1:03