En Kabylie by J. Vilbort


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Page 16

Cette conf�d�ration puissante des Flisset, ma�tresse de l'une et l'autre
rives, rendait la vall�e inabordable pour les Turcs. Ce fut pour la
rompre et enlever ainsi aux montagnards la cl� de la plaine, que le
pacha d'Alger fonda les Makhzen des Amaraoua, en les appuyant sur les
bordjs de Sebaou et de Tizi-Ouzou. Apr�s 1830, les Zmouls accoururent
souvent dans la Mitidja pour s'y livrer, sur les premi�res fermes
fran�aises, � leurs habitudes inv�t�r�es de pillage. Aujourd'hui,
exclusivement agriculteurs, ils s'associent pour le labour et l'�l�ve du
b�tail avec leurs ennemis s�culaires, les Kabyles. Leurs cultures
r�jouissent nos yeux; elles sont bien plus soign�es que celles des
Arabes ou m�me des Kabyles de la plaine. D'Alger aux Issers, le
barom�tre agronomique descend; des Issers � Tizi-Ouzou, il remonte, et,
dans la haute Kabylie, nous allons le voir au beau fixe.

Mais voici un groupe de maisons blanches qui, par leur structure, nous
rappellent le vieil Alger. C'est Taourga (la fourmili�re), autrefois
_Taugensis,_ chef-lieu d'un canton militaire romain, � pr�sent habit�
par des Turcs et des Koulourlis qui fournissaient aux cavaliers du
Makhzen leurs selles, leurs harnachements et leurs _djbiras_ [Esp�ces de
valises en cuir ornement� � plusieurs poches.].

En admirant les champs des Amaraoua, nous nous �tonnons de trouver leurs
habitations dans un �tat si mis�rable. Ce ne sont gu�re que des gourbis
arabes agrandis et construits en forme de ruches avec des branchages.
L�-dedans, la famille demeure expos�e � toutes les intemp�ries, et
c'est � peine si quelques endroits ferm�s au moyen d'un torchis de terre
et de fumier lui offrent un abri contre les pluies d'automne ou les
neiges d'hiver.

Maintenant devant nous, sur la route, se pressent des boeufs, des vaches,
des moutons, des mulets en plus grand nombre, pr�c�d�s ou suivis de
leurs guides, et ployant sous le faix de leurs larges _tellis_ tout
gonfl�s de marchandises. Hommes et b�tes se rendent au _Souk-el-Sebt_ de
Tizi-Ouzou. Le mulet kabyle remplace ici le petit �ne arabe. Il en est
le digne �mule par la sobri�t�, la r�signation et le courage; mais, plus
robuste que lui, il est un peu moins malheureux. De temps � autre
quelques b�tes effray�es, boeufs ou moutons, se mettent � courir devant
la diligence, et le ma�tre du b�tail de crier, et le postillon de faire
claquer son fouet, et les animaux que ce vacarme �pouvante de redoubler
de vitesse. Souvent cette course burlesque dure l'espace d'une lieue.
Alors les pauvres b�tes folles de terreur, mais �puis�es d'haleine,
s'�lancent brusquement sur les pentes raides de la montagne ou du ravin,
et le Kabyle saute, grimpe, bondit derri�re elles, sue sang et eau pour
les rassembler et les ramener sur la route. La diligence ne ralentit
jamais son allure: tant pis pour qui se fera �craser! Les Kabyles sont
tout aussi lents � se garer que les arabes. Cependant le postillon ne
les avertit qu'en cas de p�ril imminent; et encore est-ce presque
toujours avec le fouet qu'il leur donne cet avertissement.

--Eh! postillon, s'�crie le G�n�ral indign�, vous traitez ces braves
gens en v�ritable Turc.

--Je m�ne la poste, Madame, ne vous l'ai-je pas dit? et si je devais
m'arr�ter toutes les fois qu'ils me barrent le chemin eux et leurs
b�tes, nous n'arriverions pas aujourd'hui, mais demain. Ils doivent me
faire place et le savent bien; mais �a les ennuie, ces messieurs, de se
d�ranger pour des Roumis.

A Tizi-Ouzou [Le col du gen�t �pineux.], o� nous arrivons vers cinq
heures du soir, nous nous retrouvons en pleine France. La diligence
s'engage dans une large rue bord�e de maisons bien b�ties et s'arr�te
devant un h�tel d'assez bonne apparence. Plusieurs indig�nes s'offrent
pour porter nos bagages. L'un d'eux, un beau gar�on de dix-huit ans, �
l'oeil vif, au front intelligent, nous fait le salut militaire:

--Madame, dit-il, vous pla�t-il que ce soit moi?

--Oui, mais o� as-tu donc appris � parler si poliment?

--A l'�cole de Tizi-Ouzou, Madame, et puis mon p�re est un des spahis du
commandant.

--Sais-tu lire?

--Sans doute; �crire aussi, et calculer.

Le Philosophe s'�crie, transport�:

--Tous les fusils et tous les canons de France pour un ma�tre d'�cole!

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Books | Photos | Paul Mutton | Sun 21st Dec 2025, 13:46