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Page 13
Comme nous tournions le dos � la sc�ne sanglante, nous f�mes attir�s par
une spirale bleue qui montait lentement du milieu d'un cercle de
badauds: car il n'y a pas que les gens de commerce ou d'industrie qui
aillent aux sept _souks_ de la semaine: _el Ethnin_ du lundi, _el Tleta_
du mardi, _el Arba_ du mercredi, _el Khemis_ du jeudi, _el Djem�a_ du
vendredi, _el Sebt_ du samedi et _el H'ad_ du dimanche. Les gens de
loisir, s'il en est en Kabylie, ou tous ceux qui trouvent le temps de ne
pas travailler, n'h�sitent pas � faire huit ou dix lieues rien que pour
le plaisir de se m�ler � la compagnie bruyante des march�s. Quelques
figues dans la poche du burnous, et un sou pour boire la petite tasse de
caf�, voil� tous les frais de la f�te. Ils �taient l� une douzaine,
jeunes et vieux, assis, les jambes crois�es, autour du _cafaoudji_
[Cafetier.] et babillant comme des femmes. Ils nous saluent
tr�s-amicalement. Nous faisons remplir leurs tasses depuis fort
longtemps vides. C'est une profusion d'Allah-Isselmec [Merci:
litt�ralement protection de Dieu.]!
Les Arabes n'eussent r�pondu � notre politesse que par le silence. Mais
les Kabyles ont, presque au m�me degr� que les Fran�ais, l'esprit de
sociabilit�; comme eux, ils sont d'humeur mobile et se montrent avides
de choses nouvelles: �_Ingenio mobili, novarum rerum avidum,_� a dit
Tacite en parlant du peuple berb�re. Nous donnons un franc au cafetier
qui se confond en remerciements: quatre sous de pourboire! quatre-vingts
centimes les seize tasses d'excellent moka sucr�! Et quel �tablissement
splendide! un tapis d'un vert d'�meraude et tout �maill� de boutons d'or
et de perles blanches; un plafond d'azur avec un lustre �blouissant, des
murs d'opale hauts de cent mille coud�es! O Parisiens, combien nous vous
plaignons, vous les raffin�s, vous les envi�s de tout l'univers, de
boire en des lieux empest�s de la chicor�e am�re � cinquante centimes la
gorg�e!
Le postillon fait claquer son fouet, nous remontons en diligence. Le
march� touche � sa fin, et la route est maintenant �gay�e par une
multitude champ�tre, paysans et troupeaux, qui s'en retournent au
village. Le g�n�ral s'�tonne de voyager en pleine bucolique: ni fusils,
ni pistolets, pas le moindre _flissa_ [Sabre.]. Nous n'avons pas vu sur
le _souk_ un grain de poudre. Le postillon nous apprend que depuis
quelques ann�es la vente des armes est prohib�e sur les march�s:
--D'abord, dit-il, parce que cela leur mettait des id�es de guerre en
t�te, et puis aussi parce que des hommes de _sofs_ ennemis, se
rencontrant, en venaient souvent � se battre et � se piller entre eux.
--Qu'est-ce qu'un _sof_? demanda madame Elvire.
--C'est, lui r�pondis-je, une association arm�e de tribus ou de
villages, ou m�me seulement d'un certain nombre de familles qui
s'engagent � se d�fendre r�ciproquement contre les entreprises d'un
_sof_ ennemi, et � faire ainsi de la cause d'un seul la cause de tous.
La Kabylie tout enti�re est organis�e en _sofs_.
--Admirable! s'�cria le Philosophe, une soci�t� de secours mutuels qui
s'�tend � tout un peuple! Qu'on vienne apr�s cela nous dire que ces
gens-l� ne sont pas plus civilis�s que nous!
--Sans doute, le _sof_ a son bon c�t�; mais il y a un revers � la
m�daille: si les faibles, en se liguant contre les puissants, trouvent
dans leur union une protection efficace, il arrive souvent aussi que la
querelle d'un seul, si injuste qu'elle soit, entra�ne des centaines et
m�me des milliers d'hommes � se d�clarer la guerre et � s'entr'�gorger.
--Ils ont du moins cet avantage de combattre et de mourir pour la
d�fense d'un principe, pour le droit d'un citoyen, d'un ami, d'un fr�re,
et non pour le caprice du prince.
--Conscrit! dit le G�n�ral, tu as bien m�rit� de la r�publique...
kabyle.
En avan�ant vers l'est, nous laissons � gauche une plaine tr�s-riche qui
s'�tend vers la mer, et que des irrigations pratiqu�es avec les eaux de
l'Oued Isser rendraient encore plus productive. C'est le territoire des
lssers-Ouled-Smir, des Issers-Dj�dian, des Isser-Dreuh qui ne comptent
pas moins de 141 villages et de 2,852 fusils, c'est-�-dire autant
d'hommes en �tat de combattre. Aux portes de Dellys, habitent les
Beni-Tour, 23 villages, 615 fusils; et les Beni-Siyem, 20 Villages, 372
fusils [Devaux, les K�ba�les du Djerjera.].
Ces Kabyles des basses pentes n'ont pas l'humeur batailleuse de leurs
fr�res des hauts pitons.
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