|
Main
- books.jibble.org
My Books
- IRC Hacks
Misc. Articles
- Meaning of Jibble
- M4 Su Doku
- Computer Scrapbooking
- Setting up Java
- Bootable Java
- Cookies in Java
- Dynamic Graphs
- Social Shakespeare
External Links
- Paul Mutton
- Jibble Photo Gallery
- Jibble Forums
- Google Landmarks
- Jibble Shop
- Free Books
- Intershot Ltd
|
books.jibble.org
Previous Page
| Next Page
Page 53
--Je veux bien tout �a, dit Th�odore; mais le moyen?
--Nous le trouverons, dit le docteur en lui remettant un louis d'avance.
J'avais d�j� r�colt� quelque chose pour votre soeur dans un moment o�
elle voulait quitter le prince. Je payerai donc cette petite d�pense.
Occupez-vous vite du changement d'air et de r�sidence; demain elle
pourra �tre transport�e. La voiture la secouerait trop, j'enverrai un
brancard, et vous me ferez dire o� vous �tes, j'irai la voir dans la
soir�e.
Th�odore fit les choses vite et bien. Il trouva ce qu'il cherchait du
c�t� de l'h�pital Saint-Louis, pr�s des cultures qui dans ce temps-l�
s'�tendaient jusqu'� la barri�re de la Chopinette. Le lendemain � midi,
Francia fut mise sur le brancard et s'�tonna beaucoup d'�tre enferm�e
dans la tente de toile ray�e comme dans un lit ferm� de rideaux qui
marchait tout seul. Puis des id�es sombres lui vinrent � l'esprit. Ayant
entrevu, � travers les fentes de la toile, de la verdure et des arbres,
tandis que son fr�re et Antoine marchaient tristement � sa droite et
� sa gauche, elle crut qu'elle �tait morte, et qu'on la portait au
cimeti�re. Elle se r�signa, et d�sira seulement �tre enterr�e aupr�s de
Mourzakine, qu'elle aimait toujours.
Pourtant cette locomotion cadenc�e et le sentiment d'un air plus pur,
qui faisait frissonner la toile autour d'elle, lui caus�rent une sorte
de bien-�tre, et durant le trajet elle dormit compl�tement pour la
premi�re fois depuis son crime involontaire.
Elle fut couch�e en arrivant, et dormit encore. Le soir, elle put
r�pondre aux questions du docteur sans trop d'�garement, et le remercia
de ses bont�s: elle le reconnaissait. Elle n'osa pas lui demander s'il
�tait envoy� par Mourzakine; mais elle se souvint d'une partie des faits
accomplis. Elle pensa qu'elle �tait, par ses ordres, transf�r�e en lieu
s�r, � l'abri des poursuites du comte, r�unie � son fr�re, charg� de la
prot�ger. Elle serra faiblement les mains du docteur, et lui dit tout
bas comme il la quittait:
--Vous me pardonnez donc de ne pouvoir pas ha�r ce Russe?
Peu � peu elle cessa de le voir en imagination, et elle se souvint
de tout, except� du moment o� elle avait perdu la raison. Comment
pouvait-elle se retracer une sc�ne dont elle n'avait pas eu conscience?
Elle avait fait tant de r�ves affreux et insens�s depuis ce moment-la,
qu'elle ne distinguait plus dans ses souvenirs l'illusion de la r�alit�.
Le docteur �tudiait avec un int�r�t scientifique ce ph�nom�ne d'une
conscience pure et tranquille charg�e d'un meurtre � l'insu d'elle-m�me.
Il tenait � s'assurer de ce qu'il soup�onnait, et il lui fut facile de
savoir de Francia, qu'elle s'�tait introduite chez son amant la nuit de
sa mort. Elle se souvenait d'y �tre entr�e, mais non d'en �tre sortie,
et quand il lui demanda dans quels termes elle s'�tait s�par�e de lui
cette nuit-l�, il vit qu'elle n'en savait absolument rien. Elle avoua
qu'elle avait eu l'intention de se tuer devant lui avec un poignard
qu'il lui avait donn� et qu'elle d�crivit avec pr�cision: c'�tait bien
celui que le docteur avait aid� � retirer du cadavre. Elle croyait avoir
encore ce poignard et le cherchait ing�nument. Quand il demanda � la
jeune fille si c'�tait Mourzakine qui l'avait d�tourn�e du suicide,
elle essaya en vain de se souvenir, et ses id�es recommenc�rent �
s'embrouiller. Tant�t il lui semblait que le prince avait pris le
poignard et s'�tait tu� lui-m�me, et tant�t qu'il l'en avait frapp�e.
--Mais vous voyez bien, ajouta-t-elle, que tout cela c'est mon d�lire
qui commen�ait, car il ne m'a pas frapp�e, je n'ai pas de blessure, et
il m'aime trop pour vouloir me tuer. Quant � se tuer lui-m�me, c'est
encore un r�ve que je faisais, car il est vivant. Je l'ai vu souvent
pendant que j'�tais si malade. N'est-ce pas qu'il est venu me voir? Ne
reviendra-t-il pas bient�t? Dites-lui donc que je lui pardonne tout. Il
a eu des torts; mais, puisqu'il est venu, c'est qu'il m'aime toujours,
et moi, j'aurais beau le vouloir, je ne r�ussirai jamais � ne pas
l'aimer.
Il fallut attendre la compl�te gu�rison de Francia pour lui apprendre
que les alli�s �taient partis apr�s treize jours de r�sidence � Paris,
et qu'elle ne reverrait jamais ni Mourzakine, ni son oncle. Elle eut un
profond chagrin, qu'elle renferma, dans la crainte d'�tre accus�e de
l�chet� de coeur. Les reproches de l'invalide n'�taient pas sortis de sa
m�moire, et, en perdant l'esp�rance, elle ne perdit pas le d�sir d'�tre
estim�e encore. Elle pria le docteur de lui procurer de l'ouvrage. Il la
fit attacher � la lingerie de l'h�pital Saint-Louis, o� elle mena une
conduite exemplaire. Les jours de grande f�te, elle venait embrasser
Moynet et tendre la main � Antoine, qui esp�rait toujours l'�pouser.
Elle ne le rebutait pas, et disait qu'ayant une bonne place elle ne
voulait se mettre en m�nage qu'avec quelques �conomies. Le pauvre
Antoine en faisait de son c�t�, travaillait comme un boeuf et s'imposait
toutes les privations possibles pour r�unir une petite somme.
Previous Page
| Next Page
|
|