Francia; Un bienfait n'est jamais perdu by George Sand


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Page 51

--Prends garde, enfant!

C'�tait celle de sa m�re. Le cheval s'abattit, la vision s'�vanouit, le
fils de Diom�de ne vit et n'entendit plus rien: il �tait mort.

A l'heure o� il avait l'habitude de s'�veiller, Mozdar entra chez lui,
le crut endormi encore profond�ment et l'appela � plusieurs reprises son
_petit p�re!_ N'obtenant pas de r�ponse, il alla ouvrir les persiennes,
et vit des taches rouges sur le lit. Il y en avait tr�s-peu, la blessure
n'avait presque pas saign�, le poignard �tait rest� dans la poitrine,
enfonc� peu profond�ment, mais il avait atteint la r�gion o� la vie
s'�labore et se renouvelle. Il y avait eu �touffement rapide sans
convulsion d'agonie. Le visage, calme, �tait admirable.

Aux cris et aux sanglots du Cosaque, Valentin accourut. Il envoya
chercher la police et le docteur Faure. En attendant, il examina toutes
choses. Par un hasard presque miraculeux, car � coup s�r elle n'avait
song� � rien, Francia n'avait laiss� aucune trace de sa courte pr�sence
dans la maison ni dans le jardin. La terre �tait s�che, il n'y avait
pas la moindre empreinte. La cl� de la grille �tait dans la serrure o�
Valentin se souvenait de l'avoir laiss�e. Mozdar jurait que personne
n'avait pu passer dans le vestibule sans qu'il l'e�t entendu. Le
docteur Faure examina avec un autre chirurgien la blessure et en dressa
proc�s-verbal. Son confr�re conclut au suicide. Quant � lui, il n'y crut
pas et ne voulut pas conclure. Il songea � Francia et ne la nomma point.
Il n'�tait pas charg� de rechercher les faits: il se retira en pensant
que cette petite avait plus d'�nergie qu'il ne lui en avait suppos�.

Valentin, qui craignait beaucoup d'�tre accus�, vit avec plaisir les
soup�ons se porter sur le pauvre Mozdar, qui �tait une excellente b�te
f�roce apprivois�e, et qui pleurait � fendre l'�me. Le comte Ogoksko�,
appel� en toute h�te, vint pleurer aussi sur son neveu, et son chagrin
fut aussi sinc�re que possible chez un courtisan. Il fit arr�ter Mozdar
pour la forme; mais quand il eut d�lib�r� militairement sur son sort, il
le disculpa et d�clara que son pauvre neveu avait eu un chagrin d'amour
qui l'avait port� � se donner la mort. Il ne s'accusa pas tout haut de
lui avoir caus� ce chagrin; mais il se le reprocha int�rieurement et ne
s'en consola qu'en se disant que le pauvre enfant avait la t�te faible,
l'esprit romanesque, le coeur trop tendre, enfin qu'il �tait dans sa
destin�e d'interrompre par quelque sottise la brillante carri�re qui lui
�tait ouverte.

Le tsar daigna plaindre le jeune officier. Autour de lui, quelques
personnes se dirent tout bas que le comte Ogoksko�, jaloux de la
jeunesse et de la beaut� de son neveu, s'�tait trouv� en rivalit� aupr�s
de certaine marquise et s'�tait _fait_ d�barrasser de lui. L'affaire
n'eut pas d'autre suite. Il n'y eut pas un des Russes log�s ou camp�s �
l'h�tel Talleyrand qui ne fit � Diom�de Mourzakine cette oraison fun�bre
qui manque de nouveaut�, mais qui a le m�rite d'�tre courte:

--Pauvre gar�on! si jeune!

L'enterrement ne se fit pas avec une grande solennit� militaire. Le
suicide est toujours et partout une sorte de d�gradation.

Le marquis de Thi�vre suivit toutefois le cort�ge fun�raire de son cher
cousin, disant � qui voulait l'entendre:

--Il �tait le parent de ma femme, nous l'aimions beaucoup, nous avons
�t� si saisis par ce triste �v�nement, que madame de Thi�vre en a eu une
attaque de nerfs.

La marquise �tait r�ellement dans un �tat violent. En revenant du
cimeti�re, son mari lui dit tout bas:

--Je comprends votre �motion, ma ch�re; mais il faut surmonter cela et
rouvrir votre porte d�s ce soir. Le monde est m�chant, et ne manquerait
pas de dire que vous pleurez trop pour qu'il n'y e�t pas quelque chose
entre vous et ce jeune homme. Calmez-vous! je ne crois point cela; mais
il faut vous habiller et vous montrer: mon honneur l'exige!

La marquise ob�it et se montra. Huit jours apr�s, elle �tait plus
que jamais lanc�e dans le monde, et peut-�tre un mois plus tard se
disait-elle que le ciel l'avait pr�serv�e d'une passion trop vive, qui
e�t pu la compromettre.

Personne ne soup�onnait Francia, et, chose �trange, mais certaine,
Francia ne se soup�onnait pas elle-m�me; elle avait agi dans un acc�s de
fi�vre c�r�brale. Elle s'en �tait retourn�e instinctivement chez Moynet,
elle s'�tait jet�e sur un lit o� elle �tait encore, gravement malade, en
proie au d�lire depuis trois jours et trois nuits, et condamn�e par le
m�decin qu'on avait mand� aupr�s d'elle. Certes, la police fran�aise
l'e�t facilement retrouv�e, si Valentin l'e�t accus�e; mais il n'y
songeait pas, il ne soup�onnait que le comte Ogoksko�, qu'il d�testait
pour s'�tre jou� de lui si facilement et pour avoir r�gl� son m�moire
apr�s le d�c�s du jeune prince. Quand sa femme lui disait que la
petite avait pu s'introduire � leur insu dans le pavillon la nuit de
l'�v�nement, il haussait les �paules en lui r�pondant:

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Books | Photos | Paul Mutton | Tue 23rd Dec 2025, 8:51