Francia; Un bienfait n'est jamais perdu by George Sand


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Page 4

A vrai dire, le Diom�de barbare aurait eu grand besoin de son secours
pour comprendre l'usage et l'importance des objets de luxe et de
toilette mis � sa disposition. Il d�boucha plusieurs flacons, reculant
avec m�fiance devant les parfums les plus suaves, et cherchant celui qui
devait, selon lui, repr�senter le supr�me bon ton, la vulgaire eau de
Cologne. Il redouta les p�tes et les pommades d'une exquise fra�cheur
qui lui firent l'effet d'�tre �vent�es, parce qu'il �tait habitu� aux
produits rancis de son bagage ambulant. Enfin, s'�tant accommod� du
mieux qu'il put pour faire dispara�tre la poussi�re de sa chevelure et
de son brillant uniforme, il retournait au salon, lorsque, se voyant
toujours suivi du domestique fran�ais, il se rappela qu'il avait un
service � lui demander. Il commen�a par lui demander son nom, � quoi le
serviteur r�pondit simplement:

--Martin.

--Eh bien, Martin, faites-moi le plaisir d'envoyer une personne faubourg
Saint-Martin, num�ro,... je ne sais plus; c'est un petit caf� o� l'on
fume;... il y a des queues de billard peintes sur la devanture, c'est le
plus proche du boulevard en arrivant par le faubourg.

--On trouvera �a, r�pondit gravement Martin.

--Oui, il faut retrouver �a, reprit le prince, et il faut s'informer
d'une personne dont je ne sais pas le nom: une jeune fille de seize ou
dix-sept ans, habill�e de blanc et de bleu, assez jolie.

Martin ne put r�primer un sourire que Mourzakine comprit tr�s-vite.

--Ce n'est pas une... fantaisie, continua-t-il. Mon cheval en passant a
fait tomber cette personne; on l'a emport�e dans le caf�: je veux savoir
si elle est bless�e, et lui faire tenir mes excuses ou mon secours, si
elle en a besoin.

C'�tait parler en prince. Martin redevenu s�rieux s'inclina profond�ment
et se disposa � ob�ir sans retard.

M. de Thi�vre, apr�s avoir �t� un des satisfaits de l'empire par la
restitution de ses biens apr�s l'�migration de sa famille, �tait un
des m�contents de la fin. Avide d'honneurs et d'influence, il avait
sollicit� une place importante qu'il n'avait pas obtenue, parce qu'en se
pr�cipitant, les �v�nements d�sastreux n'avaient pas permis de contenter
tout le monde. Initi� aux efforts des royalistes pour amener par
surprise une restauration royale, il s'�tait jet� avec ardeur dans
l'entreprise et il �tait de ceux qui avaient fait aux alli�s l'accueil
que l'on sait. Il devait � sa femme l'heureuse id�e d'offrir sa maison
au premier Russe tant soit peu important dont il pourrait s'emparer. La
marquise, � pied, aux Champs-Elys�es, avait �t� admirer la revue.
Elle avait �t� frapp�e de la belle taille et de la belle figure de
Mourzakine. Elle avait r�ussi � savoir son nom, et ce nom ne lui �tait
pas inconnu; elle avait r�ellement une parente mari�e en Russie, qui
lui avait �crit quelquefois, qui s'appelait Mourzakine, et qui �tait ou
pouvait �tre parente du jeune prince. Du moment qu'il �tait prince, il
n'y avait aucun inconv�nient � r�clamer la parent�, et du moment
qu'il �tait un des plus beaux hommes de l'arm�e, il n'y avait rien de
d�sagr�able � l'avoir pour h�te.

La marquise avait vingt-deux ans; elle �tait blanche et blonde, un peu
grasse pour le costume �triqu� que l'on portait alors, mais assez grande
pour conserver une r�elle �l�gance de formes et d'allures. Elle ne
pouvait souffrir son petit mari, ce qui ne l'emp�chait pas de s'entendre
avec lui parfaitement pour tirer de toute situation donn�e le meilleur
parti possible. L�g�re pourtant et tr�s-dissip�e, elle portait dans son
ambition et dans ses convoitises d'argent une frivolit� absolue. Il ne
s'agissait pas pour elle d'intriguer habilement pour assurer une fortune
aux enfants qu'elle n'avait pas ou � la vieillesse qu'elle ne voulait
pas pr�voir. Il s'agissait de plaire pour passer agr�ablement la vie, de
mener grand train et de pouvoir faire des dettes sans trop d'inqui�tude
enfin de prendre rang � une cour quelconque, pourvu qu'on y put �taler
un grand luxe et y placer sa beaut� sur un pi�destal �lev� au-dessus de
la foule.

Elle n'�tait pas de noble race, elle avait apport� sa brillante jeunesse
avec une grosse fortune � un �poux peu s�duisant, uniquement pour �tre
marquise, et il n'e�t pas fallu lut demander pourquoi elle tenait tant
� un titre, elle n'en savait rien. Elle avait assez d'esprit pour le
babil; son intelligence pour le raisonnement �tait nulle. Toujours en
l'air, toujours occup�e de caquets et de toilettes, elle n'avait
qu'une id�e: surpasser les autres femmes, �tre au moins une des plus
remarqu�es.

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Books | Photos | Paul Mutton | Thu 9th Jan 2025, 12:11