Francia; Un bienfait n'est jamais perdu by George Sand


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Page 15

Le trait avait port� plus profond�ment que ne le voulait Mourzakine, la
marquise sonnait pour annoncer � ses gens le d�part du prince russe,
mais il ne se d�monta pas pour si peu.

--Vous avez raison, ma cousine, dit-il avec une �motion profonde. Il
faut que je vous dise adieu pour jamais; soyez s�re que j'emporterai
votre image dans mon coeur au fond des mines de la Sib�rie.

--Que parlez-vous de Sib�rie? Pourquoi?

--Pour avoir lev� mes arr�ts, je n'aurai certes pas moins!

--Ah �a! c'est donc quelque chose d'atroce que votre pays? Restez,
restez;... je ne veux pas vous perdre. Louis, dit-elle au domestique
appel� par la sonnette, emportez ces fleurs, qui m'incommodent.

Et, d�s qu'il fut sorti, elle ajouta:

--Vous resterez, mon cousin, mais vous me direz comment il faut agir
pour nous pr�server, vous et moi, de la rancune de votre grand magot
d'oncle. En conscience, je ne peux pas �tre s�rieusement aimable avec
lui, je le d�teste!

--Soyez aimable comme une femme vertueuse qu'aucune s�duction ne peut
�mouvoir ou compromettre. Les hommes comme lui n'en veulent pas � la
vertu. Ils ne sont pas jaloux d'elle. Persuadez-lui qu'il n'a pas de
rival. Sacrifiez-moi, dites-lui du mal de moi, raillez-moi devant lui.

--Vous souffririez cela! dit la marquise, frapp�e de la platitude de ces
nuances de caract�re qu'elle ne saisissait pas.

Il lui prit alors un d�go�t r�el, et elle ajouta:

--Cousin, je ferai tout ce qui pourra vous �tre utile, except� cela. Je
dirai tout simplement � votre oncle que vous ne me plaisez ni l'un ni
l'autre... Pardon! il faut que j'aille m'habiller un peu, c'est l'heure
o� je re�ois.

Et elle sortit sans attendre de r�ponse.

--Je l'ai bless�e, se dit Mourzakine. Elle croit que, par politique, je
renonce � lui plaire. Elle me prend pour un enfant parce qu'elle est une
enfant elle-m�me. Il faudra qu'elle m'aime assez pour m'aider de bonne
gr�ce � tromper mon oncle.

Une demi-heure plus tard, le salon de madame de Thi�vre �tait rempli
de monde. Le grand �v�nement de l'entr�e des �trangers � Paris avait
suspendu la veille toutes les relations. D�s le lendemain, la vie
parisienne reprenait son cours avec une agitation extraordinaire
dans les hautes classes. Tandis que les hommes se r�unissaient en
conciliabules fi�vreux, les femmes, saisies d'une ardente curiosit� de
l'avenir, se questionnaient avec inqui�tude ou se renseignaient dans un
esprit de propagande royaliste. Madame de Thi�vre, dont on savait le
mari actif et ambitieux, �tait le point de mire de toutes les femmes
de son cercle. Elle ne leur pr�cha pas la l�gitimit�, plusieurs n'en
avaient pas besoin, elles �taient toutes converties; d'autres n'y
comprenaient goutte et flairaient d'o� viendrait le vent. Madame de
Thi�vre, avec un aplomb remarquable, leur dit qu'on aurait bient�t
une cour, qu'il s'agissait de chercher d'avance le moyen de s'y faire
pr�senter des premi�res, et qu'il serait bien � propos de d�lib�rer sur
le costume.

--Mais n'aurons-nous pas une reine qui r�glera ce point essentiel? dit
une jeune femme.

--Non, ma ch�re, r�pond�t une dame �g�e. Le roi n'est pas remari�; mais
il y a _Madame_, sa ni�ce, la fille de Louis XVI, qui est fort pieuse,
et qui remplacera vos nudit�s par un costume d�cent.

--Ah! mon Dieu! dit la jeune femme � l'oreille de sa voisine en
d�signant celle qui venait de parler, est-ce que nous allons toutes �tre
habill�es comme elle?

--Ah �a! dit une autre en s'adressant � la marquise, on dit que vous
avez chez vous un Russe beau comme le jour. Vous nous le cachez donc?

--Mon Russe n'est qu'un cosaque, r�pondit madame de Thi�vre; il ne vaut
pas la peine d'�tre montr�.

--Vous h�bergez un cosaque? dit une petite baronne encore
tr�s-provinciale; est-ce vrai que ces hommes-l� ne mangent que de la
chandelle?

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Books | Photos | Paul Mutton | Fri 19th Dec 2025, 20:26