Main
- books.jibble.org
My Books
- IRC Hacks
Misc. Articles
- Meaning of Jibble
- M4 Su Doku
- Computer Scrapbooking
- Setting up Java
- Bootable Java
- Cookies in Java
- Dynamic Graphs
- Social Shakespeare
External Links
- Paul Mutton
- Jibble Photo Gallery
- Jibble Forums
- Google Landmarks
- Jibble Shop
- Free Books
- Intershot Ltd
|
books.jibble.org
Previous Page
| Next Page
Page 3
--Je voyais que vous aviez le d�sir de voir cette belle ville, et je
savais qu'un mot vous aurait emp�ch� d'y venir. Pourquoi vous aurais-je
fait changer de r�solution!
--Oui, j'en aurais chang�, r�pondis-je en frappant du pied.
Eussions-nous �t� � l'entr�e de cette ville maudite, j'aurais fait virer
la barque vers une rive que ce souvenir n'e�t pas souill�e; je vous
y aurais conduite, je vous y aurais port�e � la nage, s'il e�t fallu
choisir entre un pareil trajet et la maison que voici, o� peut-�tre
vous retrouvez � chaque pas une trace br�lante de _son_ passage! Mais,
dites-moi donc, Juliette, o� je pourrai me r�fugier avec vous contre le
pass�? Nommez-moi donc une ville, enseignez-moi donc un coin de l'Italie
o� cet aventurier ne vous ait pas tra�n�e?
J'�tais p�le et tremblant de col�re; Juliette se retourna lentement, me
regarda avec froideur, et reportant les yeux vers la fen�tre:--Venise,
dit-elle, nous t'avons aim�e autrefois, et aujourd'hui je ne te revois
pas sans �motion; car il te ch�rissait, il t'invoquait partout dans ses
voyages, il t'appelait sa ch�re patrie; car c'est toi qui fus le berceau
de sa noble maison, et un de tes palais porte encore le m�me nom que
lui.
--Par la mort et par l'�ternit�! dis-je � Juliette en baissant la voix,
nous quitterons demain cette ch�re patrie!
--_Vous_ pourrez quitter demain et Venise et Juliette, me r�pondit-elle
avec un sang-froid glacial; mais pour moi je ne re�ois d'ordre de
personne, et je quitterai Venise quand il me plaira.
--Je crois vous comprendre, Mademoiselle, dis-je avec indignation: Leoni
est � Venise.
Juliette fut frapp�e d'une commotion �lectrique.--Qu'est-ce que tu dis?
Leoni est � Venise? s'�cria-t-elle dans une sorte de d�lire, en se
jetant dans mes bras; r�p�te ce que tu as dit; r�p�te son nom, que
j'entende au moins encore une fois son nom! Elle fondit en larmes, et,
suffoqu�e par ses sanglots, elle perdit presque connaissance. Je la
portai sur le sofa, et, sans songer � lui donner d'autres secours, je me
remis � marcher sur la bordure du tapis. Alors ma fureur s'apaisa comme
la mer quand le sirocco replie ses ailes. Une douleur am�re succ�da �
mon emportement, et je me pris � pleurer comme une femme.
II.
Au milieu de ce d�chirement, je m'arr�tai � quelques pas de Juliette et
je la regardai. Elle avait le visage tourn� vers la muraille; mais une
glace de quinze pieds de haut, qui remplissait le panneau, me permettait
de voir son visage. Elle �tait p�le comme la mort, et ses yeux �taient
ferm�s comme dans le sommeil; il y avait plus de fatigue encore que de
douleur dans l'expression de sa figure, et c'�tait l� pr�cis�ment la
situation de son �me: l'�puisement et la nonchalance l'emportaient sur
le dernier bouillonnement des passions. J'esp�rai.
Je l'appelai doucement, et elle me regarda d'un air �tonn�, comme si sa
m�moire perdait la facult� de conserver les faits en m�me temps que son
�me perdait la force de ressentir le d�pit.
--Que veux-tu, me dit-elle, et pourquoi me r�veilles-tu?
--Juliette, lui dis-je, je t'ai offens�e, pardonne-le-moi; j'ai bless�
ton coeur...
--Non, dit-elle en portant une main � son front et en me tendant
l'autre, tu as bless� mon orgueil seulement. Je t'en prie, Aleo,
souviens-toi que je n'ai rien, que je vis de tes dons, et que l'id�e de
ma d�pendance m'humilie. Tu as �t� bon et g�n�reux envers moi, je le
sais; lu me combles de soins, tu me couvres de pierreries, tu m'accables
de ton luxe et de ta magnificence; sans toi je serais morte dans quelque
h�pital d'indigents, ou je serais enferm�e dans une maison de fous. Je
sais tout cela. Mais souviens-toi, Bustamente, que tu as fait tout cela
malgr� moi, que tu m'as prise � demi morte, et que tu m'as secourue sans
que j'eusse le moindre d�sir de l'�tre; souviens-toi que je voulais
mourir et que tu as pass� bien des nuits � mon chevet, tenant mes mains
dans les tiennes pour m'emp�cher de me tuer; souviens-toi que j'ai
refus� longtemps ta protection et tes bienfaits, et que si je les
accepte aujourd'hui, c'est moiti� par faiblesse et par d�couragement
de la vie, moiti� par affection et par reconnaissance pour toi, qui
me demandes � genoux de ne pas les repousser. Le plus beau r�le
t'appartient, � mon ami, je le sens; mais suis-je coupable de ce que tu
es bon? doit-on me reprocher s�rieusement de m'avilir, lorsque, seule et
d�sesp�r�e, je me confie au plus noble coeur qui soit sur la terre?
Previous Page
| Next Page
|
|