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Page 20
--Oh! lui dis-je, voici aupr�s du contr�le un cachet imperceptible:
c'est la marque de mon p�re. Avec une loupe tu y verras son chiffre.
--A la bonne heure, dit-il; cette �pingle sera rest�e dans un de nos
coffres de voyage, et je l'aurai fait tomber ce matin en secouant
quelque harde. Heureusement c'est le seul bijou que nous ayons emport�
par m�garde; tous les autres ont �t� remis � une personne s�re et
adress�s � Delpech, qui les aura exactement remis � ta famille. Je ne
pense pas que celui-ci vaille la peine d'�tre rendu; ce serait imposer �
ta m�re une triste �motion de plus pour bien peu d'argent.
--Cela vaut encore au moins dix mille francs, r�pondis-je.
--Eh bien, garde-le jusqu'� ce que tu trouves une occasion pour le
renvoyer. Ah �a! es-tu pr�te? les malles sont-elles referm�es? Il y a
une gondole � la porte, et ta maison t'attend avec impatience; on sert
d�j� le souper.
Une demi-heure apr�s nous nous arr�t�mes � la porte d'un palais
magnifique. Les escaliers �taient couverts de tapis de drap amarante;
les rampes, de marbre blanc, �taient charg�es d'orangers en fleurs, en
plein hiver, et de l�g�res statues qui semblaient se pencher sur nous
pour nous saluer. Le concierge et quatre domestiques en livr�e vinrent
nous aider � d�barquer. Leoni prit le flambeau de l'un d'eux, et,
l'�levant, il me fit lire sur la corniche du p�ristyle cette inscription
en lettres d'argent sur un fond d'azur: Palazzo Leoni.--O mon ami,
m'�criai-je, tu ne nous avais donc pas tromp�s? Tu es riche et noble, et
je suis chez toi!
Je parcourus ce palais avec une joie d'enfant. C'�tait un des plus
beaux de Venise. L'ameublement et les tentures, �clatants de fra�cheur,
avaient �t� copi�s sur les anciens mod�les, de sorte que les peintures
des plafonds et l'ancienne architecture �taient dans une harmonie
parfaite avec les accessoires nouveaux. Notre luxe de bourgeois et
d'hommes du Nord est si mesquin, si entass�, si commun, que je n'avais
jamais con�u l'id�e d'une pareille �l�gance. Je courais dans les
immenses galeries comme dans un palais enchant�; tous les objets avaient
pour moi des formes inusit�es, un aspect inconnu; je me demandais si
je faisais un r�ve, et si j'�tais vraiment la patronne et la reine de
toutes ces merveilles. Et puis, cette splendeur f�odale m'entourait d'un
prestige nouveau. Je n'avais jamais compris le plaisir ou l'avantage
d'�tre noble. En France on ne sait plus ce que c'est, en Belgique on ne
l'a jamais su. Ici, le peu de noblesse qui reste est encore fastueux et
fier; on ne d�molit pas les palais, on les laisse tomber. Au milieu de
ces murailles charg�es de troph�es et d'�cussons, sous ces plafonds
armori�s, en face de ces a�eux de Leoni peints par Titien et V�ron�se,
les uns graves et s�v�res sous leurs manteaux fourr�s, les autres
�l�gants et gracieux sous leur justaucorps de satin noir, je comprenais
cette vanit� du rang, qui peut �tre si brillante et si aimable quand
elle ne d�core pas un sot. Tout cet entourage d'illustration allait si
bien � Leoni, qu'il me serait impossible aujourd'hui encore de me le
repr�senter roturier. Il �tait vraiment bien le fils de ces hommes �
barbe noire et � mains d'alb�tre, dont Van Dyck a immortalis� le type.
Il avait leur profil d'aigle, leurs traits d�licats et fins, leur
grande taille, leurs yeux � la fois railleurs et bienveillants. Si ces
portraits avaient pu marcher, ils auraient march� comme lui; s'ils
avaient parl�, ils auraient eu son accent.--Eh quoi! lui disais-je en le
serrant dans mes bras, c'est toi, mon seigneur Leone Leoni, qui �tais
l'autre jour dans ce chalet entre les ch�vres et les poules, avec une
pioche sur l'�paule et une blouse autour de ta taille? C'est toi qui as
v�cu six mois ainsi avec une pauvre fille sans nom et sans esprit, qui
n'a d'autre m�rite que de t'aimer? Et tu vas me garder pr�s de toi, tu
vas m'aimer toujours, et me le dire chaque matin, comme dans le chalet?
Oh! c'est un sort trop �lev� et trop beau pour moi; je n'avais pas
aspir� si haut, et cela m'effraie en m�me temps que cela m'enivre.
--Ne sois pas effray�e, me dit-il en souriant, sois toujours ma compagne
et ma reine. A pr�sent, viens souper, j'ai deux convives � te pr�senter.
Arrange tes cheveux, sois jolie; et quand je t'appellerai ma femme,
n'ouvre pas de grands yeux �tonn�s.
Nous trouv�mes un souper exquis sur une table �tincelante de vermeil,
de porcelaines et de cristaux. Les deux convives me furent gravement
pr�sent�s; ils �taient V�nitiens, tous deux agr�ables de figure,
�l�gants dans leurs mani�res, et, quoique bien inf�rieurs � Leoni,
ayant dans la prononciation et dans la tournure d'esprit une certaine
ressemblance avec lui. Je lui demandai tout bas s'ils �taient ses
parents.
--Oui, me r�pondit-il tout haut en riant, ce sont mes cousins.
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