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Page 75
Quand on aborde une oeuvre d'art avec le d�sir, si faible qu'il
soit, d'exercer une autorit� sur elle et sur l'artiste, on
l'aborde dans des dispositions telles qu'on ne saurait en recevoir
la moindre impression artistique.
_L'oeuvre d'art est faite pour s'imposer au spectateur; le
spectateur n'a point � s'imposer � l'oeuvre d'art._
Le spectateur doit �tre un r�cepteur. Il doit �tre le violon sur
lequel jouera le ma�tre.
Et mieux il arrivera � supprimer compl�tement ses sottes mani�res
de voir, ses sots pr�jug�s, ses id�es absurdes sur ce que l'art
devrait �tre ou ne peut pas �tre, plus il est probable qu'il
comprendra, qu'il appr�ciera l'oeuvre d'art dont il s'agit.
Certes, cela est chose �vidente, quand on parle du public vulgaire
anglais, hommes et femmes, qui fr�quente le th��tre. Mais c'est
�galement vrai en ce qui concerne les personnes d'�ducation, comme
on dit.
En effet, les id�es que poss�de sur l'Art une personne d'�ducation
se tirent forc�ment de ce que l'Art a �t�, tandis que l'oeuvre
d'Art nouvelle est belle parce qu'elle est ce que l'Art n'a jamais
�t�. Lui appliquer le pass� comme mesure, c'est lui appliquer une
mesure dont la suppression est la condition m�me de sa perfection.
Un temp�rament capable de recevoir par l'interm�diaire de
l'imagination, et dans des circonstances d�pendant de
l'imagination, des impressions belles et nouvelles, voil� le seul
temp�rament capable d'appr�cier une oeuvre d'Art.
Et si vrai que cela soit, quand il s'agit d'appr�cier de la
sculpture ou de la peinture, c'est plus vrai encore pour
l'appr�ciation d'un art tel que le drame. Car un tableau, une
statue ne sont point en guerre avec le temps. Ils n'ont point �
tenir compte de sa succession. Il suffit d'un moment pour en
appr�cier l'unit�. Mais pour la litt�rature, le cas est diff�rent.
Il faut parcourir une certaine dur�e, avant que l'unit� d'effet
soit per�ue.
Aussi dans le drame, le premier acte de la pi�ce peut pr�senter
quelques d�tails dont la r�elle valeur artistique ne saurait
appara�tre au spectateur que quand on sera au troisi�me ou au
quatri�me.
L'imb�cile a-t-il le droit de se f�cher, de se r�crier, de
troubler la repr�sentation, de tourmenter les acteurs?
Non.
L'honn�te homme attendra en silence, conna�tra les d�licieuses
�motions de l'�tonnement, de la curiosit�, de l'attente. Il n'ira
pas au th��tre pour perdre patience, cette chose sans valeur. Il
ira au th��tre pour voir se d�ployer un temp�rament artistique. Il
ira au th��tre pour se donner un temp�rament artistique. Il n'est
point l'arbitre d'une oeuvre d'art. Il est celui qu'on admet �
contempler l'oeuvre d'art, et qui, si l'oeuvre est belle, devra
oublier dans la contemplation de celle-ci, l'�gotisme dont il est
atteint, l'�gotisme de son ignorance, ou l'�gotisme de son �tat
arri�r�.
Cette caract�ristique du drame est, je crois, insuffisamment
reconnue.
Je puis m'expliquer fort bien que si _Macbeth_ �tait repr�sent�
pour la premi�re fois devant une salle de Londoniens modernes, la
plus grande partie d'entre eux protesteraient de toute leur force,
de toute leur �nergie, contre l'introduction des sorci�res au
premier acte, avec leurs phrases grotesques, leurs mots ridicules.
Mais quand la pi�ce tire � sa fin, l'on comprend que le rire des
sorci�res dans _Macbeth_ est aussi terrible que le rire de la
folie dans _Le Roi Lear_, plus terrible que le rire d'Iago dans la
trag�die du Maure.
Aucun spectateur d'art n'a plus besoin d'un plus parfait �tat de
r�ceptivit� que le spectateur d'une pi�ce. D�s le moment o� il
pr�tend exercer de l'autorit�, il se fait l'ennemi d�clar� de
l'Art et de lui-m�me. L'Art ne s'en soucie gu�re; c'est l'autre,
qui en souffre.
Pour le roman, c'est la m�me chose.
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