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Page 12
Je pensai � Cyril Graham et mes yeux se remplirent de larmes.
II
Il �tait midi pass� quand je m'�veillai et le soleil ruisselait �
travers les rideaux de ma chambre en longues coul�es obliques d'or
poussi�reux.
Je dis � mon domestique que je n'�tais chez moi pour personne et,
apr�s avoir pris une tasse de chocolat et un petit pain, j'allai
chercher sur un rayon de ma biblioth�que mon exemplaire des
_Sonnets _de Shakespeare et je commen�ai � les parcourir avec
grande attention.
Chaque po�me me parut une confirmation de la th�orie de Cyril
Graham.
Il me semblait que j'avais la main appuy�e sur le coeur de
Shakespeare et que je comptais un � un tous les battements et
toutes les pulsations de la passion.
Je songeai au merveilleux acteur adolescent et je vis son visage
dans chaque vers.
Deux sonnets, je m'en souviens, me frapp�rent particuli�rement:
c'�taient le 53e et le 67e.
Dans le premier de ces sonnets, Shakespeare, louant Willie Hughes
de la souplesse de son jeu, du vaste champ de ses r�les, un champ
qui s'�tend de Rosalinde � Juliette et de B�atrice � Oph�lie, lui
dit:
_De quelle substance �tes-vous donc fait, vous qu'escortent des
millions d'ombres �tranges? Chaque �tre n'a qu'une ombre unique,
et vous, qui n'�tes qu'un pourtant, vous pr�tez votre ombre �
tout,_
vers qui �taient inintelligibles s'ils ne s'adressaient pas � un
acteur, car le mot _ombre _avait au temps de Shakespeare un sens
qui se rattachait � la sc�ne.
�Les meilleurs en ce genre ne sont que des ombres,� dit Th�s�e des
acteurs dans le _Songe d'une Nuit d'�t�, _et il y a bien d'autres
allusions similaires dans la litt�rature de l'�poque.
Les _Sonnets _appartenaient �videmment aux s�ries dans lesquelles
Shakespeare disait la nature de l'art de l'acteur et du
temp�rament �trange et rare qui est indispensable au parfait
com�dien.
�Comment se fait-il, dit Shakespeare � Willie Hughes, que vous
ayez tant de personnalit�s�, et alors il en arrive � �tablir que
sa beaut� est telle qu'elle semble r�aliser toute forme et toute
phase de fantaisie, incarner tout r�ve de l'imagination cr�atrice,
une id�e, qui est encore exprim�e plus avant dans le sonnet qui
suit imm�diatement, ou en commen�ant par la d�licate pens�e:
_Oh! comme la beaut� semble plus belle lorsqu'elle est embaum�e
par _LA V�RIT�.
Shakespeare nous invite � remarquer combien la v�rit� du jeu, la
v�rit� de la repr�sentation visible sur la sc�ne, ajoute au
prestige de la po�sie, donne la vie � toute sa nature s�duisante
et la r�alit� actuelle � sa forme id�ale.
Et pourtant, dans le 67e sonnet, Shakespeare invite Willie Hughes
� renoncer � la sc�ne si artificielle avec sa vie fausse, ses
mimes au visage maquill� et au costume sans r�alit�, ses
influences et ses suggestions immorales, son �loignement du vrai
monde, de l'action r�elle et du langage sinc�re.
_Oh! pourquoi mon bien-aim� vivrait-il avec la corruption et
honorerait-il le sacril�ge de son prestige en sorte que le p�ch�
obtiendrait par lui un avantage d�cisif et se parerait de sa
soci�t�?_
_Pourquoi le fard imiterait-il le teint de ses joues et
plagierait-il, par une copie inanim�e, leurs vives couleurs?_
_Pourquoi la pauvre beaut� chercherait-elle indirectement les
reflets de la rose, quand elle a la rose vraie?_
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