Teverino by George Sand


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Page 43

--N'avez-vous point vu que c'�tait de la col�re?

--Vous parlez comme un jaloux, en v�rit�!

--L'amiti� a ses jalousies comme l'amour. C'est vous qui l'avez dit ce
matin.

--Eh bien, soit; cela orne et anime l'amiti�, dit Sabina avec un
irr�sistible mouvement de coquetterie.

Elle �tait effray�e d'avoir failli aimer Teverino, et elle s'effor�ait
de se cr�er un pr�servatif en stimulant l'affection probl�matique de
L�once. Elle n'y r�ussit que trop. Il prit sa main et l'�chauffa
dans les siennes, jusqu'� ce qu'elle la retir�t br�lante. Madeleine
paraissait assoupie; pourtant elle s'�veilla � ce mouvement, et lady
G... se sentit confuse du regard �tonn� de l'oiseli�re. Elle lui fit une
caresse pour �carter toute hostilit� de la pens�e de cette enfant; mais
ce ne fut pas de bien bon coeur, et il lui sembla que Madeleine souriait
avec plus de malice qu'on ne l'en e�t crue capable.

--T�tebleu! o� sommes-nous? s'�cria tout d'un coup le cur� en regardant
autour de lui.

--Nous en sommes � saint J�r�me, r�pliqua Teverino.

--Il ne s'agit plus de saint J�r�me, Monsieur, mais du chemin que vous
nous faites prendre; quelle est cette vall�e? o� va cette route? o�
diable nous avez-vous conduits, enfin?

On �tait parvenu au sommet d'une mont�e longue et p�nible, et, en
tournant le rocher, o� depuis une heure on marchait encaiss�, on
voyait une vall�e immense se d�ployer sous les pieds � une profondeur
�tourdissante. Du plateau o� se trouvaient nos voyageurs, de
gigantesques rochers couronn�s de neige se dressaient encore vers le
ciel; la nature �tait aride, bizarre, effroyablement romantique; mais
devant eux, la route, redevenue une rampe rapide, s'enfon�ait en mille
d�tours pittoresques vers les plans abaiss�s d'une contr�e fertile,
riante et richement color�e. Quoi de plus beau qu'un pareil spectacle
au coucher du soleil, lorsqu'� travers le cadre anguleux de la nature
alpestre, on d�couvre la splendeur des terres f�condes, les flancs
verdoyants des collines interm�diaires, que les feux de l'occident font
resplendir, ces ab�mes de verdure d�roul�s dans l'espace, les fleuves
et les lacs embras�s, sem�s dans ce vaste tableau comme des miroirs
ardents, et, au del� encore, les zones bleu�tres qui se m�lent sans se
confondre, les horizons violets et le ciel sublime de lumi�re et de
transparence! Sabina fit un cri d'admiration:--Ah! L�once! dit-elle en
lui reprenant la main, que je vous remercie de m'avoir conduite ici! que
Dieu soit lou� de cette journ�e!

--Et moi aussi, je vous remercie bien, dit le cur� avec d�sespoir; nous
ne risquons rien de nous recommander � Dieu, car de souper et de g�te il
n'en faut plus parler. Nous voici � plus de dix lieues de chez nous,
et nous marchons vers Venise ou vers Milan en droite ligne, au lieu de
chercher notre �toile polaire et le coq de notre clocher.

--Au lieu de blasph�mer ainsi, dit Teverino, vous devriez �tre � genoux,
cur�, et b�nir l'�ternel, cr�ateur et conservateur de si grandes choses!
Me voil� tout � fait m�content de votre foi, et si je ne vous aimais, je
vous d�noncerais de suite � mon oncle le saint-p�re. Est-ce ainsi,
abb� sans cervelle et sans principes, que vous devriez saluer la terre
d'Italie et le chemin qui conduit � la ville �ternelle!

--C'est donc l'Italie? s'�cria Sabina en s'�lan�ant sur le chemin; ma
ch�re Italie, que je r�ve depuis mon enfance, et que mon tra�tre de mari
me permettait � peine de voir en peinture! Eh quoi! marquis, vous nous
avez fait entrer en Italie!

--_O cara patria!_ chanta Teverino, et, entonnant de sa belle voix le
noble r�citatif de _Tancredi: �Terra degli avi miei, ti bacio!�_

--Fermez vos oreilles, dit L�once: voici une nouvelle s�duction contre
laquelle je ne vous avais pas pr�venue. Le marquis chante comme Orph�e.

--Ah! c'est la voix de l'Italie! Peu m'importe de quelle bouche elle
s'exhale! Il me semble que c'est la terre et le ciel qui chantent ce
cantique d'amour et le font p�n�trer dans mon coeur. L'Italie! � mon
Dieu! je pourrai donc dire que j'ai au moins salu� les horizons de
l'Italie! C'est � votre ing�nieux vouloir, c'est � l'audace de notre
guide que je dois cette jouissance supr�me. Laissez-moi vous b�nir tous
les deux.

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Books | Photos | Paul Mutton | Mon 22nd Dec 2025, 11:21