Teverino by George Sand


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Page 40

Le torrent ne paraissait pas tr�s-gonfl�, et Teverino allait y lancer
la voiture, lorsque Madeleine, qui s'�tait pench�e en avant avec une
pr�voyance calme, l'arr�ta vigoureusement.

--L'eau n'est pas claire, dit-elle; une forte avalanche de neige a d� y
tomber, il n'y a pas plus de deux heures. Vous n'y passerez pas.

--Milady, voulez-vous vous fier � moi? dit Teverino. Nous passerons, je
vous en r�ponds. Que ceux qui ont peur descendent.

--Je demande � descendre! s'�cria le cur� en s'�lan�ant sur le
marchepied.

La n�gresse le suivit, et le jockey, partag� entre le point d'honneur et
la crainte de se noyer, se pla�a devant les chevaux en attendant qu'on
e�t pris un parti.

--Sabina, dit L�once d'un ton d autorit�, descendez.

--Je ne descendrai pas, r�pondit-elle; c'est la premi�re fois que je
sens le plaisir qu'on peut trouver dans le p�ril. Je veux me donner
cette �motion.

--Je ne le souffrirai pas, reprit L�once en lui saisissant le bras avec
force. C'est un acte de d�mence.

--Vous n'avez point de droits sur ma vie, L�once, et le marquis,
d'ailleurs, en r�pond.

--Le marquis est un sot! s'�cria L�once, exasp�r� de voir la subite
passion de lady G... se trahir si follement.

Le marquis se retourna et regarda L�once avec des yeux flamboyants.

--Vous voulez dire que vous �tes deux fous, dit Sabina, essayant
de cacher l'effroi que lui causait cette querelle. Je c�de � votre
sollicitude, L�once; marquis, vous descendrez aussi. Le jockey, qui nage
comme un poisson, peut se risquer seul � faire passer la voiture.

--Je nage mieux que tous les jockeys et que tous les poissons du monde,
reprit Teverino, et je ne vois d'ailleurs pas pourquoi la vie de cet
enfant serait expos�e plut�t que la mienne. Dans mon opinion, Madame, un
homme en vaut un autre, et si j'ai voulu risquer le passage, c'est � moi
d'en subir seul les cons�quences. Combien valent vos chevaux, L�once?
ajouta-t-il d'un air d'opulence fanfaronne.

--Je t'en fais pr�sent, dit L�once, noie-les si tu veux. Mais je te
dirai deux mots sur l'autre rive, ajouta-t-il � voix basse.

--Vous ne me direz rien du tout; mais demain � deux heures de
l'apr�s-midi, c'est moi qui vous parlerai, r�pondit Teverino. Vous �tes
l'agresseur, j'ai le droit de choisir le moment, et, en �change, je vous
laisse le choix des armes. En attendant, par respect pour vous-m�me qui
m'avez pr�sent� � cette dame, affectez pour moi une �troite amiti� qui
explique vos paroles grossi�res.

--Un duel? un duel avec vous? Eh bien! soit, r�pondit L�once, et il
ajouta tout haut: Si nous ne nous battons pas ensemble, marquis, apr�s
avoir �chang� de telles douceurs, c'est qu'on ne peut nous accuser
d'�tre deux poltrons, et, pour le prouver, nous allons passer l'eau
ensemble. Eh bien! que fais-tu l�? dit-il � Madeleine, qui avait grimp�
lestement sur le si�ge aupr�s du marquis.

--Bah! il n'y a pas de danger pour moi, dit-elle, et je vous suis
n�cessaire pour vous diriger. A droite, monsieur le marquis, et puis, �
gauche, marchez!

Ce ne fut pas sans une stupeur profonde que les autres voyageurs,
arriv�s en haut du pont, s'arr�t�rent pour voir s'effectuer ce passage
p�rilleux. Au milieu de l'eau, la violence du courant souleva la
voiture, qui se mit � flotter comme une nacelle, entra�nant les chevaux
vers les arches aigu�s du petit pont ogival.

--Cedex au courant, et reprenez! dit Madeleine froidement attentive,
comme s'il se f�t agi d'une chose facile.

Les chevaux, �nergiquement stimul�s, et assez forts, heureusement, pour
n'�tre pas emport�s par cette voiture l�g�re, firent quelques bonds,
perdirent pied, se mirent � la nage, retrouv�rent pied sur un roc,
tr�buch�rent, et se relevant sous la puissante main de l'aventurier,
gagn�rent, sans aucun accident f�cheux, un endroit moins profond, d'o�
ils atteignirent facilement la rive, sans qu'un seul trait e�t �t�
rompu, et sans que leurs conducteurs fussent mouill�s autrement que par
quelques �claboussures.

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Books | Photos | Paul Mutton | Mon 22nd Dec 2025, 5:10