Teverino by George Sand


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Page 38

[Illustration: Perdu dans le taillis de ch�nes.]

L�once devint soucieux, et Sabina fut forc�e de le secouer pour le tirer
de ses r�veries. Le soleil baissait, le temps �tait propice pour s'en
retourner; le cur�, plus impatient encore de faire cuire ses truites et
ses champignons que de calmer les inqui�tudes de sa gouvernante et de
son sacristain, invitait ses convives � revenir avec lui au presbyt�re.
Madeleine, assise � l'�cart, et compl�tement muette, semblait
indiff�rente � tout ce qui se passait autour d'elle.

--Seigneur L�ontio, dit le vagabond en italien � L�once, au moment o�
ils allaient remonter en voiture, �tes-vous amoureux de lady Sabina?

--Vous �tes bien curieux, _Signor marchese!_ r�pondit L�once aven une
s�cheresse ironique.

--Non! mais je suis votre ami, un royal ami, et je dois conna�tre vos
sentiments, afin de ne pas les contrarier.

--Vous �tes un fat, mon cher!

--Vous avez d�j� du d�pit? Eh bien, que vous disais-je, que vingt-quatre
heures entre nous seraient le bout du monde? Allons, j'ai devin� votre
secret, et je n'ai pas besoin d'insister. L�once, vous reconna�trez que
Teverino est un galant homme!

Et s'�lan�ant sur le si�ge:--C'est moi qui suis le cocher, dit-il �
haute voix. Dame �r�be, dit-il � la n�gresse, vous irez dans la voiture
et je conduirai les chevaux. J'ai la passion des chevaux!

--Ceci n'est pas aimable, observa lady G..., �videmment contrari�e de
cet arrangement. Notre soci�t� n'a gu�re d'attraits pour vous, Marquis!

--Et puis vous ne connaissez pas le pays, objectais le cur�. Nous nous
sommes d�j� �gar�s; n'allez pas nous faire souper de la ros�e du soir et
coucher � la belle �toile, au moins!

--Laissez donc faire le marquis, dit L�once, et si vous parlez d'�toile,
fiez-vous � la sienne! Sais-tu conduire? demanda-t-il � Teverino.

--Peut-�tre! r�pondit celui-ci, quoique je n'aie jamais essay�.

--Grand merci! s'�cria le bourru. Vous allez nous verser, nous rompre
les os! Il n'y a pas � plaisanter avec les pr�cipices et les chemins
�troits. Monsieur! Monsieur! laissez les r�nes � ce jeune gar�on, qui
s'en sert fort bien.

--Ne fais pas de folies, dit tout bas L�once � Teverino; si tu n'as pas
�t� cocher, ne t'en m�le pas.

--Tout s'improvise, r�pondit le marquis, et je me sens si inspir� que je
conduirais les chevaux du Soleil.

L�-dessus il fouetta les chevaux de L�once qui partirent au grand galop.

--Pas par ici, pas par ici! cria le cur�, jurant malgr� lui. O� diable
allez-vous? Sainte-Apollinaire est sur la gauche.

--Vous vous trompez, l'abb�, r�pondit le pha�ton; je connais mieux les
montagnes que vous.

Et se penchant vers L�once, assis imm�diatement derri�re lui:--O�
faut-il aller? lui demanda-t-il � l'oreille.

--Partout, nulle part, au diable, si bon te semble! r�pondit L�once du
m�me ton.

--En ce cas, � tous les diables! reprit Teverino, et, fouettant de
nouveau, il laissa maugr�er le cur� que la peur rendit bient�t p�le et
muet.

Une telle �pouvante n'�tait pas trop mal fond�e. Teverino �tait plus
adroit qu'exp�riment�. Naturellement t�m�raire, et dou� d'une pr�sence
d'esprit, d'une agilit� et d'une force de corps sup�rieures � celles de
la plupart des hommes, il m�prisait le danger, et ne connaissait pas
d'obstacles moraux ou mat�riels qu'il ne p�t tourner ou franchir. Dans
cette persuasion, ravi de l'�nergie et de la finesse des chevaux de
L�once, il les lan�a au bord des ab�mes, d�daignant de les ralentir
quand le chemin devenait d'une �troitesse effrayante, effleurant les
troncs d'arbres, les blocs de rochers, gravissant des pentes abruptes,
les descendant � fond de train, et enlevant une roue br�lante sur
l'extr�me limite du ravin � pic au fond duquel grondait le torrent.
D'abord, Sabina eut peur aussi, s�rieusement peur; et trouvant la
plaisanterie de fort mauvais go�t, elle commen�a � craindre que ce
marquis italien ne f�t comme les gens mal �lev�s, qui se font un sot
plaisir des souffrances d'une femme timide. Pourtant, elle ne laissa
para�tre ni son angoisse ni son m�contentement; elle savait que la seule
vengeance permise au faible, en pareil cas, c'est de ne point r�jouir
l'audace brutale par le spectacle de ses tourments. Sabina �tait assez
fi�re pour affronter la mort plut�t que de sourciller. Elle s'effor�a
donc de rire et de railler le cur�, bien qu'au fond de l'�me elle f�t
encore moins rassur�e que lui.

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Books | Photos | Paul Mutton | Mon 22nd Dec 2025, 1:16