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Page 21
--Si fait. Je le regarde quand il dort, et je crois qu'il est beau comme
le soleil; mais je ne peux pas dire que je m'y connaisse.
--Quand il dort! vous entrez donc dans sa chambre?
--Je n'ai pas la peine d'y entrer, puisque j'y dors moi-m�me. Nous ne
sommes pas riches, Altesse; nous n'avons qu'une chambre pour nous, avec
ma ch�vre et le cheval de mon fr�re.
--C'est la vie primitive! Mais dans tout cela, tu ne dors gu�re, puisque
tu passes les nuits � contempler ton bon ami?
--Oh! je n'y passe gu�re qu'un quart d'heure apr�s qu'il s'est endormi.
Il se couche et s'endort pendant que je r�cite ma pri�re tout haut, le
dos tourn�, au bout de la chambre. Il est vrai qu'ensuite je m'oublie
quelquefois � le regarder plus longtemps que je ne puis le dire. Mais
ensuite le sommeil me prend, et il me semble que je dors mieux apr�s.
--D'o� il r�sulte pourtant qu'il dort plus que toi?
--Mais il dort tr�s-bien, lui; pourquoi ne dormirait-il pas? la maison
est tr�s-propre, quoique pauvre, et j'ai soin que son lit soit toujours
bien fait.
--Il ne se r�veille donc pas, lui, pour te regarder pendant ton sommeil?
--Je n'en sais rien, mais je ne le crois pas, je l'entendrais. J'ai le
sommeil l�ger comme celui d'un oiseau.
--Il t'aime donc moins que tu ne l'aimes?
--C'est possible, dit tranquillement l'oiseli�re apr�s un instant de
r�flexion, et m�me �a doit �tre, puisque je suis encore trop jeune pour
qu'il m'�pouse.
--Enfin, tu es certaine qu'il t'aimera un jour assez pour t'�pouser?
--Il ne m'a rien promis; mais il me dit tous les jours: �Madeleine, tu
es bonne comme Dieu, et je voudrais ne jamais te quitter. Je suis bien
malheureux de songer que, bient�t peut-�tre, je serai forc� de m'en
aller.� Moi, je ne r�ponds rien, mais je suis bien d�cid�e � le suivre,
afin qu'il ne soit pas malheureux; et puisqu'il me trouve bonne et
d�sire ne jamais me quitter, il est certain qu'il m'�pousera quand je
serai en �ge.
--Eh bien, L�once, dit Sabina en anglais � son ami, admirons, et
gardons-nous de troubler par nos doutes cette foi sainte de l'�me d'un
enfant. Il se peut que son amant la s�duise et l'abandonne; il se peut
qu'elle soit bris�e par la honte et la douleur; mais encore, dans son
d�sastre, je trouverais son existence digne d'envie. Je donnerais tout
ce que j'ai v�cu, tout ce que je vivrai encore, pour un jour de cet
amour sans bornes, sans arri�re-pens�e, sans h�sitation, aveugl�ment
sublime, o� la vie divine p�n�tre en nous par tous les pores.
--Certes, elle vit dans l'extase, dit L�once, et sa passion la
transfigure. Voyez comme elle est belle, en parlant de celui qu'elle
aime, malgr� que la nature ne lui ait rien donn� de ce qui fait de vous
la plus belle des femmes! Eh bien! pourtant, � cette heure, Sabina, elle
est beaucoup plus belle que vous. Ne le pensez-vous pas ainsi?
--Vous avez une mani�re de dire des grossi�ret�s qui ne peut pas me
blesser aujourd'hui, quoique vous y fassiez votre possible. Cependant,
L�once, il y a quelque chose d'impitoyable dans votre amiti�. Mon
malheur est assez grand de ne pouvoir conna�tre cet amour extatique,
sans que vous veniez me le reprocher juste au moment o� je mesurais
l'�tendue de ma mis�re. Si je voulais me venger, ne pourrais-je pas vous
dire que vous �tes aussi mis�rable que moi, aussi incapable de croire
aveugl�ment et d'aimer sans arri�re pens�e? qu'enfin les m�mes ab�mes de
savoir et d'exp�rience nous s�parent l'un et l'autre de l'�tat de l'�me
de cet enfant?
--Cela, vous n'en savez rien, rien en v�rit�! r�pondit L�once avec
�nergie, mais sans qu'il f�t possible d'interpr�ter l'�motion de sa
voix: son regard errait sur le paysage.
--Nous parcourons un affreux pays, dit lady G..., apr�s un assez
long silence. Ces roches nues, ce torrent toujours irrit�, ce ciel
�troitement encadr�, cette chaleur �touffante, et jusqu'au lourd sommeil
de cet homme d'�glise, tout cela porte � la tristesse et � l'effroi de
la vie.
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