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Page 54
Ce coup impr�vu faillit tuer mon p�re. Il perdit sa fermet�
habituelle, et sa douleur, muette d�habitude, s�exhala en plainte
am�res. �Comment! ne cessait-il de r�p�ter tout hors de lui-m�me,
comment! mon fils a particip� aux complots de Pougatcheff? Dieu
juste! jusqu�o� ai-je v�cu? L�imp�ratrice lui fait gr�ce de la
vie; mais est-ce plus facile � supporter pour moi? Ce n�est pas le
supplice qui est horrible; mon a�eul a p�ri sur l��chafaud pour la
d�fense de ce qu�il v�n�rait dans le sanctuaire de sa
conscience[65], mon p�re a �t� frapp� avec les martyrs Volynski et
Khouchlchoff[66]; mais qu�un gentilhomme trahisse son serment,
qu�il s�unisse � des bandits, � des sc�l�rats, � des esclaves
r�volt�s, ... honte, honte �ternelle � notre race!�
Effray�e de son d�sespoir, ma m�re n�osait pas pleurer en sa
pr�sence et s�effor�ait de lui rendre du courage en parlant des
incertitudes et de l�injustice de l�opinion; mais mon p�re �tait
inconsolable.
Marie se d�solait plus que personne. Bien persuad�e que j�aurais
pu me justifier si je l�avais voulu, elle se doutait du motif qui
me faisait garder le silence, et se croyait la seule cause de mes
infortunes. Elle cachait � tous les yeux ses souffrances, mais ne
cessait de penser au moyen de me sauver. Un soir, assis sur son
sofa, mon p�re feuilletait le _Calendrier de la cour;_ mais ses
id�es �taient bien loin de l�, et la lecture de ce livre ne
produisait pas sur lui l�impression ordinaire. Il sifflait une
vieille marche. Ma m�re tricotait en silence, et ses larmes
tombaient de temps en temps sur son ouvrage. Marie, qui
travaillait dans la m�me chambre, d�clara tout � coup � mes
parents qu�elle �tait forc�e de partir pour P�tersbourg, et
qu�elle les priait de lui en fournir les moyens. Ma m�re se montra
tr�s afflig�e de cette r�solution.
�Pourquoi, lui dit-elle, veux-tu aller � P�tersbourg? Toi aussi,
tu veux donc nous abandonner?�
Marie r�pondit que son sort d�pendait de ce voyage, et qu�elle
allait chercher aide et protection aupr�s des gens en faveur,
comme fille d�un homme qui avait p�ri victime de sa fid�lit�.
Mon p�re baissa la t�te. Chaque parole qui lui rappelait le crime
suppos� de son fils lui semblait un reproche poignant.
�Pars, lui dit-il enfin avec un soupir; nous ne voulons pas mettre
obstacle � ton bonheur. Que Dieu te donne pour mari un honn�te
homme, et non pas un tra�tre tach� d�infamie!�
Il se leva et quitta la chambre.
Rest�e seule avec ma m�re, Marie lui confia une partie de ses
projets: ma m�re l�embrassa avec des larmes, en priant Dieu de lui
accorder une heureuse r�ussite. Peu de jours apr�s, Marie partit
avec Palachka et le fid�le Sav�liitch, qui, forc�ment s�par� de
moi, se consolait en pensant qu�il �tait au service de ma fianc�e.
Marie arriva heureusement jusqu�� Sofia, et, apprenant que la cour
habitait en ce moment le palais d��t� de Tsars-ko��-S�lo, elle
r�solut de s�y arr�ter. Dans la maison de poste on lui donna un
petit cabinet derri�re une cloison. La femme du ma�tre de poste
vint aussit�t babiller avec elle, lui annon�a pompeusement qu�elle
�tait la ni�ce d�un chauffeur de po�les attach� � la cour, et
l�initia � tous les myst�res du palais. Elle lui dit � quelle
heure l�imp�ratrice se levait, prenait le caf�, allait � la
promenade; quels grands seigneurs se trouvaient alors aupr�s de sa
personne; ce qu�elle avait daign� dire la veille � table; qui elle
recevait le soir; en un mot, l�entretien d�Anna Vlassievna[67]
semblait une page arrach�e aux m�moires du temps, et serait tr�s
pr�cieuse de nos jours. Marie Ivanovna l��coutait avec grande
attention. Elles all�rent ensemble au jardin imp�rial, o� Anna
Vlassievna raconta � Marie l�histoire de chaque all�e et de chaque
petit pont. Toutes les doux regagn�rent ensuite la maison,
enchant�es l�une de l�autre.
Le lendemain, de tr�s bonne heure, Marie s�habilla et retourna
dans le jardin imp�rial. La matin�e �tait superbe. Le soleil
dorait de ses rayons les cimes des tilleuls qu�avait d�j� jaunis
la fra�che haleine de l�automne. Le large lac �tincelait immobile.
Les cygnes, qui venaient de s��veiller, sortaient gravement des
buissons du rivage. Marie Ivanovna se rendit au bord d�une
charmante prairie o� l�on venait d��riger un monument en l�honneur
des r�centes victoires du comte Roumiantzieff[68]. Tout � coup un
petit chien de race anglaise courut � sa rencontre en aboyant.
Marie s�arr�ta effray�e. En ce moment r�sonna une agr�able voix de
femme.
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