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Page 31
�Ah! ah! c�est Votre Seigneurie, dit Pougatcheff en me voyant.
Soyez le bienvenu. Honneur � vous et place au banquet!�
Les convives se serr�rent; je m�assis en silence au bout de la
table. Mon voisin, jeune Cosaque �lanc� et de jolie figure, me
versa une rasade d�eau-de-vie, � laquelle je ne touchai pas.
J��tais occup� � consid�rer curieusement la r�union. Pougatcheff
�tait assis � la place d�honneur, accoud� sur la table et appuyant
sa barbe noire sur son large poing. Les traits de son visage,
r�guliers et agr�ables, n�avaient aucune expression farouche. Il
s�adressait souvent � un homme d�une cinquantaine d�ann�es, en
l�appelant tant�t comte, tant�t Timof�itch, tant�t mon oncle. Tous
se traitaient comme des camarades, et ne montraient aucune
d�f�rence bien marqu�e pour leur chef. Ils parlaient de l�assaut
du matin, du succ�s de la r�volte et de leurs prochaines
op�rations. Chacun se vantait de ses prouesses, exposait ses
opinions et contredisait librement Pougatcheff. Et c�est dans cet
�trange conseil de guerre qu�on prit la r�solution de marcher sur
Orenbourg, mouvement hardi et qui fut bien pr�s d��tre couronn� de
succ�s. Le d�part fut arr�t� pour le lendemain.
Les convives burent encore chacun une rasade, se lev�rent de
table, et prirent cong� de Pougatcheff. Je voulais les suivre,
mais Pougatcheff me dit:
�Reste l�, je veux te parler.�
Nous demeur�mes en t�te-�-t�te.
Pendant quelques instants continua un silence mutuel. Pougatcheff
me regardait fixement, en clignant de temps en temps son oeil
gauche avec une expression ind�finissable de ruse et de moquerie.
Enfin, il partit d�un long �clat de rire, et avec une gaiet� si
peu feinte, que moi-m�me, en le regardant, je me mis � rire sans
savoir pourquoi.
�Eh bien! Votre Seigneurie, me dit-il; avoue-le, tu as eu peur
quand mes gar�ons t�ont jet� la corde au cou? je crois que le ciel
t�a paru de la grandeur d�une peau de mouton. Et tu te serais
balanc� sous la traverse sans ton domestique. J�ai reconnu �
l�instant m�me le vieux hibou. Eh bien, aurais-tu pens�, Votre
Seigneurie, que l�homme qui t�a conduit au g�te dans la steppe
�tait le grand tsar lui-m�me?�
En disant ces mots, il prit un air grave et myst�rieux.
�Tu es bien coupable envers moi, reprit-il, mais je t�ai fait
gr�ce pour ta vertu, et pour m�avoir rendu service quand j��tais
forc� de me cacher de mes ennemis. Mais tu verras bien autre
chose, je te comblerai de bien autres faveurs quand j�aurai
recouvr� mon empire. Promets-tu de me servir avec z�le?�
La question du bandit et son impudence me sembl�rent si risibles
que je ne pus r�primer un sourire.
�Pourquoi ris-tu? me demanda-t-il en fron�ant le sourcil; est-ce
que tu ne crois pas que je sois le grand tsar? r�ponds-moi
franchement.�
Je me troublai. Reconna�tre un vagabond pour empereur, je n�en
�tais pas capable; cela me semblait une impardonnable l�chet�.
L�appeler imposteur en face, c��tait me d�vouer � la mort; et le
sacrifice auquel j��tais pr�t sous le gibet, en face de tout le
peuple et dans la premi�re chaleur de mon indignation, me
paraissait une fanfaronnade inutile. Je ne savais que dire.
Pougatcheff attendait ma r�ponse dans un silence farouche. Enfin
(et je me rappelle encore ce moment avec la satisfaction de moi-
m�me) le sentiment du devoir triompha en moi de la faiblesse
humaine. Je r�pondis � Pougatcheff:
��coute, je te dirai toute la v�rit�. Je t�en fais juge. Puis-je
reconna�tre en toi un tsar? tu es un homme d�esprit; tu verrais
bien que je mens.
-- Qui donc suis-je d�apr�s toi?
-- Dieu le sait; mais, qui que tu sois, tu joues un jeu
p�rilleux.�
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