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Page 1
� l'h�tel Beauvau, miss Lydia eut un amer d�sappointement. Elle
rapportait un joli croquis de la porte p�lasgique ou cyclop�enne
de Segni, qu'elle croyait oubli�e par les dessinateurs. Or, lady
Frances Fenwich, la rencontrant � Marseille, lui montra son album,
o�, entre un sonnet et une fleur dess�ch�e, figurait la porte en
question, enlumin�e � grand renfort de terre de Sienne. Miss Lydia
donna la porte de Segni � sa femme de chambre, et perdit toute
estime pour les constructions p�lasgiques.
Ces tristes dispositions �taient partag�es par le colonel Nevil,
qui, depuis la mort de sa femme, ne voyait les choses que par les
yeux de miss Lydia. Pour lui, l'Italie avait le tort immense
d'avoir ennuy� sa fille, et par cons�quent c'�tait le plus
ennuyeux pays du monde. Il n'avait rien � dire, il est vrai,
contre les tableaux et les statues; mais ce qu'il pouvait assurer,
c'est que la chasse �tait mis�rable dans ce pays-l�, et qu'il
fallait faire dix lieues au grand soleil dans la campagne de Rome
pour tuer quelques m�chantes perdrix rouges.
Le lendemain de son arriv�e � Marseille, il invita � d�ner le
capitaine Ellis, son ancien adjudant, qui venait de passer six
semaines en Corse. Le capitaine raconta fort bien � miss Lydia une
histoire de bandits qui avait le m�rite de ne ressembler nullement
aux histoires de voleurs dont on l'avait si souvent entretenue sur
la route de Rome � Naples. Au dessert, les deux hommes, rest�s
seuls avec des bouteilles de vin de Bordeaux, parl�rent chasse, et
le colonel apprit qu'il n'y a pas de pays o� elle soit plus belle
qu'en Corse, plus vari�e, plus abondante. �On y voit force
sangliers, disait le capitaine Ellis, et il faut apprendre � les
distinguer des cochons domestiques, qui leur ressemblent d'une
mani�re �tonnante; car, en tuant des cochons, l'on se fait une
mauvaise affaire avec leurs gardiens. Ils sortent d'un taillis
qu'ils nomment maquis, arm�s jusqu'aux dents, se font payer leurs
b�tes et se moquent de vous. Vous avez encore le mouflon, fort
�trange animal qu'on ne trouve pas ailleurs, fameux gibier, mais
difficile. Cerfs, daims, faisans, perdreaux, jamais on ne pourrait
nombrer toutes les esp�ces de gibier qui fourmillent en Corse. Si
vous aimez � tirer, allez en Corse, colonel; l�, comme disait un
de mes h�tes, vous pourrez tirer sur tous les gibiers possibles,
depuis la grive jusqu'� l'homme.�
Au th�, le capitaine charma de nouveau miss Lydia par une histoire
de vendetta transversale[1], encore plus bizarre que la premi�re,
et il acheva de l'enthousiasmer pour la Corse en lui d�crivant
l'aspect �trange, sauvage du pays, le caract�re original de ses
habitants, leur hospitalit� et leurs moeurs primitives. Enfin, il
mit � ses pieds un joli petit stylet, moins remarquable par sa
forme et sa monture en cuivre que par son origine. Un fameux
bandit l'avait c�d� au capitaine Ellis, garanti pour s'�tre
enfonc� dans quatre corps humains. Miss Lydia le passa dans sa
ceinture, le mit sur sa table de nuit, et le tira deux fois de son
fourreau avant de s'endormir. De son c�t�, le colonel r�va qu'il
tuait un mouflon et que le propri�taire lui en faisait payer le
prix, � quoi il consentait volontiers, car c'�tait un animal tr�s
curieux, qui ressemblait � un sanglier, avec des cornes de cerf et
une queue de faisan.
�Ellis conte qu'il y a une chasse admirable en Corse, dit le
colonel, d�jeunant t�te � t�te avec sa fille; si ce n'�tait pas si
loin, j'aimerais � y passer une quinzaine.
-- Eh bien, r�pondit miss Lydia, pourquoi n'irions-nous pas en
Corse? Pendant que vous chasseriez, je dessinerais; je serais
charm�e d'avoir dans mon album la grotte dont parlait le capitaine
Ellis, o� Bonaparte allait �tudier quand il �tait enfant.�
C'�tait peut-�tre la premi�re fois qu'un d�sir manifest� par le
colonel e�t obtenu l'approbation de sa fille. Enchant� de cette
rencontre inattendue, il eut pourtant le bon sens de faire
quelques objections pour irriter l'heureux caprice de miss Lydia.
En vain il parla de la sauvagerie du pays et de la difficult� pour
une femme d'y voyager: elle ne craignait rien; elle aimait par-
dessus tout � voyager � cheval; elle se faisait une f�te de
coucher au bivouac; elle mena�ait d'aller en Asie Mineure. Bref,
elle avait r�ponse � tout, car jamais Anglaise n'avait �t� en
Corse; donc elle devait y aller. Et quel bonheur, de retour dans
Saint-Jame's Place, de montrer son album! �Pourquoi donc, ma
ch�re, passez-vous ce charmant dessin? -- Oh! ce n'est rien. C'est
un croquis que j'ai fait d'apr�s un fameux bandit corse qui nous a
servi de guide. -- Comment! vous avez �t� en Corse?...�
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