Port-Tarascon by Alphonse Daudet


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Page 10

-- Est-ce vrai que les sauvages vont tout nus?

-- ��, c'est peut-�tre un peu vrai, mais pas tous. D'ailleurs nous
les habillerons.�

Articles, conf�rences, tout eut un succ�s fou. Les bons
s'enlevaient par cent et par mille, les �migrants affluaient, et
pas seulement de Tarascon, de tout le Midi! Il en venait m�me de
Beaucaire. Mais, halte l�! Tarascon les trouvait bien hardis, ces
gens de Beaucaire!

Depuis des si�cles, entre les deux cit�s voisines, s�par�es
seulement par le Rh�ne, gronde une haine sourde qui menace de ne
plus finir.

Si vous en cherchez les motifs, on vous r�pondra des deux c�t�s
par des mots qui n'expliquent rien:

�Nous les connaissons, les Tarasconnais...,� disent les gens de
Beaucaire, d'un ton myst�rieux.

Et ceux de Tarascon ripostent en clignant leur oeil finaud:

�On sait ce qu'ils valent, messieurs les Beaucairois.�

De fait, d'une ville � l'autre les communications sont nulles, et
le pont qu'on a jet� entre elles ne sert absolument � rien.
Personne ne le franchit jamais. Par hostilit� d'abord, ensuite
parce que la violence du mistral et la largeur du fleuve � cet
endroit en rendent le passage tr�s dangereux.

Mais si l'on n'acceptait pas de colons de Beaucaire, l'argent de
tout le monde �tait parfaitement accueilli. Les fameux hectares �
5 francs (rendement de plusieurs mille francs par an) se
d�bitaient par fourn�es. On recevait aussi de partout les dons en
nature que les fervents de l'oeuvre envoyaient pour les besoins de
la colonie. Le Forum publiait les listes, et parmi ces dons se
trouvaient les choses les plus extraordinaires:

_Anonyme_: Une bo�te de petites perles blanches.

-- Un lot de num�ros du _Forum_.

_M. B�coulet_: Quarante-cinq r�silles en chenilles et perles
pour les femmes indiennes.

_Mme Dourladoure_: Six mouchoirs et six couteaux pour le
presbyt�re.

_Anonyme:_ Une banni�re brod�e pour l'orph�on.

_Anduze, de Maguelonne_: Un flamant empaill�.

_Famille Margue_: Six douzaines de colliers de chiens.

_Anonyme_: Une veste soutach�e.

_Une dame pieuse de_ Marseille: Une chasuble, un orfroi de
thurif�raire et un pavillon de ciboire.

_La m�me_: Une collection de col�opt�res sous verre.

Et, r�guli�rement, dans chaque liste, �tait mentionn� un envoi de
Mlle Tournatoire: _Costume complet pour habiller un sauvage_.
C'�tait sa pr�occupation constante, � cette bonne vieille
demoiselle.

Tous ces dons bizarres, fantaisistes, o� la cocasserie m�ridionale
�talait son imagination, �taient dirig�s par pleines caisses sur
les docks, les grands magasins de la Colonie libre, �tablis �
Marseille. Le duc de Mons avait fix� l� son centre d'op�rations.

De ses bureaux, luxueusement install�s, il brassait en grand les
affaires, montait des soci�t�s de distillerie de canne � sucre ou
d'exploitation du tripang, sorte de mollusque dont les Chinois
sont tr�s friands et qu'ils payent fort cher, disait le
prospectus. Chaque journ�e de l'infatigable duc voyait �clore une
id�e nouvelle, poindre quelque grande machination qui le soir m�me
se trouvait lanc�e.

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Books | Photos | Paul Mutton | Mon 28th Apr 2025, 23:17