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Page 7
Le fils de Diom�de mordit sa l�vre vermeille et s'aper�ut de sa sottise.
Il fallait y mettre plus de temps et prendre plus de peine. Il s'en
tira par un regard suppliant et un soupir �touff�. Ce n'�tait pas
grand'chose, mais sa physionomie exprimait si bien l'espoir d��u et le
d�sir persistant, que madame de Thi�vre en fut troubl�e et n'eut pas le
courage d'insister sur la le�on qu'elle venait de lui donner.
Elle lui parla politique. Le marquis avait �t� la veille aux
informations, de dix heures du soir � minuit. Il avait pu p�n�trer
� l'h�tel Talleyrand; elle n'ajouta pas qu'il s'�tait tenu dans les
antichambres avec nombre de royalistes de second ordre, pour saisir les
nouvelles au passage, mais elle croyait savoir que le tsar n'�tait pas
oppos� � l'id�e d'une restauration de l'ancienne dynastie.
La chose �tait parfaitement indiff�rente � Mourzakine. Il avait
d'ailleurs ou� dire � son oncle que le tsar faisait fort peu de cas des
Bourbons et il ne pensait pas du tout qu'il en vint � les soutenir;
mais, pour ne pas choquer les opinions de son h�tesse, il prit le parti
de la questionner sur ces Bourbons dont elle-m�me ne savait presque
rien, tant la conception de leur r�tablissement �tait nouvelle. La
conversation languissait, lorsqu'il s'imagina de lui parler de modes
fran�aises, de lui faire compliment sur sa toilette du matin, de la
questionner sur le costume des diff�rentes classes de la soci�t� de
Paris.
Elle �tait experte en ces mati�res, et consentit � l'�clairer.
--A Paris, lui dit-elle, il n'y a pas de costume propre � une classe
plut�t qu'� une autre: toute femme qui a le moyen de payer un chapeau
porte un chapeau dans la rue, tout homme qui peut se procurer des bottes
et un habit a le droit de les porter. Vous ne reconna�trez pas toujours
au premier coup d'oeil un domestique de son ma�tre; quelquefois le valet
de chambre qui vous annoncera dans une maison sera mieux mis que le
ma�tre de la maison: c'est � la physionomie, c'est au regard surtout
qu'il faut s'attacher pour bien sp�cifier l'�tat on le rang des
personnes. Un parvenu n'aura jamais l'aisance et la dignit� d'un vrai
grand seigneur, f�t-il chamarr� de broderies et de d�corations; une
grisette aura beau s'endimancher, elle ne sera jamais prise par une
bourgeoise pour sa pareille, et il en sera de m�me pour nous, femmes
du grand monde, d'une bourgeoise couverte de diamants et habill�e plus
richement que nous.
--Fort bien, dit Mourzakine, je vois qu'il faut du _tact_, une grande
science du tact! Mais vous avez parl� de grisettes, et je connais ce
mot-l�. J'ai lu des romans fran�ais o� il en �tait question. Qu'est-ce
que c'est au juste qu'une grisette de Paris? J'ai cru longtemps que
c'�tait une classe de jeunes filles habill�es en gris.
--Je ne sais pas l'�tymologie de ce nom, r�pondit madame de Thi�vre;
leur costume est de toutes les couleurs; peut-�tre le mot vient-il du
genre d'�motions qu'elles procurent.
--Ah ah! j'entends! grisette! l'ivresse d'un moment! elles ne font point
de passions?
--Ou bien encore...; mais je ne sais pas! les honn�tes femmes ne peuvent
pas renseigner sur cette sorte de cr�atures.
--Pourtant, la d�finition du costume entra�nerait celle de la situation:
appelle-t-on grisettes toutes les jeunes ouvri�res de Paris?
--Je ne crois pas! l'�pith�te ne s'applique qu'� celles qui ont des
moeurs l�g�res. Ah ��! pourquoi me faites-vous cette question-l� avec
tant d'insistance? On dirait que vous �tes curieux des sottes aventures
que Paris offre � bon march� aux nouveaux-venus?
Il y avait du d�pit et m�me une jalousie brutalement ing�nue dans
l'accent de madame de Thi�vre. Mourzakine en prit note et se h�ta de la
rassurer en lui racontant succinctement son aventure de la veille et en
lui avouant qu'il �tait aux arr�ts pour ce fait � l'h�tel de Thi�vre.
--C'est, ajouta-t-il, parce que votre valet de chambre, en d�signant la
cause de ma disgr�ce, s'est servi du mot _grisette_, que je tenais �
savoir ce que ce pouvait �tre.
--Ce n'est pas grand'chose, reprit la marquise. Il faut lui envoyer un
louis d'or, et tout sera dit?
--Il parait qu'elle ne veut rien, dit Mourzakine, qui crut inutile
d'ajouter que la grisette demandait � le voir.
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