Teverino by George Sand


Main
- books.jibble.org



My Books
- IRC Hacks

Misc. Articles
- Meaning of Jibble
- M4 Su Doku
- Computer Scrapbooking
- Setting up Java
- Bootable Java
- Cookies in Java
- Dynamic Graphs
- Social Shakespeare

External Links
- Paul Mutton
- Jibble Photo Gallery
- Jibble Forums
- Google Landmarks
- Jibble Shop
- Free Books
- Intershot Ltd

books.jibble.org

Previous Page | Next Page

Page 72

--Je le vois: apr�s?

--Voyez-vous une petite prairie, verte comme l'�meraude, qui se dessine
sur le flanc de ces rochers sombres? Le sentier, qui fuit au loin, la
c�toie.

--Je vois encore la prairie. Et puis?

--Et puis, il y a un massif de sapins, et le sentier s'y perd.

--Oui, et encore?

--Et au del� des sapins, au del� du sentier, il y a un enfoncement de
terrains couverts de bruy�res; et puis la cime nue de la montagne.

--Et puis le ciel? dit L�once impatient�. Quelle m�taphore pr�pares-tu
de si loin?

--Aucune. Vous n'avez pas bien remarqu�. Entre la cime du mont et le
ciel, il y a une esp�ce de baraque en planches de sapin, assujetties par
des pieux et retenues par de grosses pierres. Avez-vous la vue longue?

--Je distingue parfaitement cette cabane. Je vois m�me les oiseaux qui
voltigent en grand nombre dans le ciel au-dessus.

--Eh bien, si vous voyez les oiseaux, vous savez quelle est cette
chaumi�re, et pourquoi il me pla�t tant de m'�tablir ici, � une
demi-heure de chemin, pour qui a d'aussi bonnes jambes que Madeleine et
votre serviteur.

--C'est donc l� la demeure de l'oiseli�re?

--Vous pouvez voir maintenant un petit mantelet �carlate, un point
rouge, que le soleil fait �tinceler, et qui se meut autour de cette
mis�rable cahute! C'est, Madeleine, c'est mon petit ange, c'est l'enfant
de mon coeur, c'est mon �me, c'est ma vie! Je ne pouvais pas profiter
plus longtemps de l'hospitalit� que cette fille et son h�ro�que bandit
de fr�re m'ont offerte, un jour que, haletant, poudreux, ab�m� de
fatigue, au bout de ma derni�re obole, mais insouciant et joyeux de
saluer les horizons de la France, je m'�tais assis � leur porte,
demandant un peu de lait de ch�vre pour �tancher ma soif. Je leur ai
plu, ils ont pris confiance en moi; ils m'ont retenu, je les ai aim�s,
et je n'ai pu me d�cider � les quitter, bien que ma conscience me fit un
devoir de ne pas ajouter ma mis�re � la leur. Mais maintenant, quoique
je me sois tenu dans les endroits les plus d�serts, et que personne
n'ait vu de pr�s ma figure, on a distingu� de loin la forme d'un
vagabond qui s'attachait aux pas de Madeleine; et Madeleine, compromise
dans l'esprit de son cur�, serait bient�t forc�e de me chasser ou de
fuir avec moi. C'est ce que je ne veux pas, et c'est pourquoi, lorsque
vous m'avez rencontr� au nord du lac, j'allais offrir mes services aux
moines de ce couvent, afin de trouver chez eux un abri, non loin de
mes braves amis de la montagne. C'est pourquoi aussi je vous ai amen�s
aujourd'hui en ce lieu, afin d'y prendre cong� de vous, et de pouvoir
vous y restituer vos beaux habits, sans demeurer nu comme vous m'avez
trouv�.

--Vous les garderez pour sortir d'ici quand il vous plaira, dit L�once,
je l'exige, ainsi que l'or qui garnissait les poches de votre gilet.
Vous ne pouvez pas refuser le moyen d'adoucir un peu la mis�re de
Madeleine et de son fr�re.

--Il y avait de l'or dans mes poches? dit Teverino avec insouciance; je
n'y avais pas fait attention. Eh bien, si vous ne le reprenez, je le
mettrai ici dans le tronc des pauvres, et Madeleine en aura sa part; car
je n'entends rien au r�le de tr�sorier, et je ne veux pas qu'il soit dit
que j'aie fait le marquis pendant vingt-quatre heures pour autre chose
que pour mon plaisir. Milady a magnifiquement r�compens� la petite pour
l'amusement qu'elle lui a donn�; Madeleine est donc riche � cette heure,
et moi, j'aurai gagn� ici, dans deux mois, de quoi subvenir pendant
longtemps � tous ses besoins.

--Mais dans deux mois, o� iras-tu? que feras-tu de Madeleine?

--Je l'aime tant, et j'en suis tant aim�, que, si elle n'�tait pas trop
jeune pour se marier, j'en ferais ma femme; mais il faut que j'attende
au moins deux ans, et, si j'avais le malheur d'en devenir trop amoureux
auparavant, elle serait en grand danger. Il faut donc que je la quitte,
et m�me avant deux mois, si mon affection paternelle vient � changer de
nature.

Previous Page | Next Page


Books | Photos | Paul Mutton | Sat 27th Dec 2025, 3:43